Montréal, la congestionnée

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La congestion routière empire d’année en année à Montréal, et cela ne risque pas de changer de sitôt. État de la situation.

L’entrevue que nous accorde Yves Desautels, chroniqueur à la circulation à Radio-Canada, en fin d’après-midi est constamment interrompue. Un auditeur rapporte un ralentissement inhabituel sur le boulevard Pie IX; un autre le prévient d’un accident rue Sherbrooke. Ses trois téléphones et son téléavertisseur ne dérougissent pas. Yves Desautels nous rassure : «C’est une journée tranquille aujourd’hui.»

La situation s’est aggravée depuis 1998, année où le chroniqueur a commencé à couvrir la circulation. «Avant, on parlait de l’heure de pointe du matin parce qu’elle durait vraiment une heure, soit entre 7 h 30 et 8 h 30, se souvient-il. Aujourd’hui, les routes sont congestionnées de 6 h à 9 h. Le soir, c’est de 15 h à 18 h.»

En 2005, les automobilistes de la région de Montréal passaient en moyenne 76 minutes par jour dans leur voiture, soit 14 minutes de plus qu’en 1992, selon Statistique Canada. Perdre tout ce temps a un prix : 1,25 milliard de dollars (1,4 milliard si on inclut le carburant et l’usure des véhicules), d’après une étude dévoilée par le ministère des Transports (MTQ) en avril 2009 effectuée à partir de l’enquête Origine-Destination 2003 de l’Agence métropolitaine de transport (AMT).

Or, ce montant est certainement plus élevé aujourd’hui, estime Gilles Joubert, président d’ADEC, firme de conseils en économie, administration et marketing qui a collaboré à l’étude du MTQ. «Le parc automobile a continué de croître, les gens travaillent de plus en plus loin de leur résidence et la capacité du réseau routier n’a pas augmenté depuis 40 ans», résume-t-il.

Les routes n’ont peut-être pas changé, mais la société québécoise, elle, s’est transformée ces dernières décennies. «Les femmes effectuent beaucoup plus de déplacements depuis qu’elles ont investi massivement le marché du travail, ajoute Pierre Tremblay, ingénieur au MTQ. Avec deux salaires, les ménages ont plus de revenus, ce qui facilite l’achat d’automobiles.»

Toujours plus loin

Le grand coupable de cet engorgement demeure l’étalement urbain, dénonce Florence Junca-Adenot, professeure d’urbanisme à l’Université du Québec à Montréal et ancienne présidente-directrice générale de l’AMT. Entre 2003 et 2008, selon l’AMT, la population a crû de 7,5 % à Laval, de 11,1 % dans la couronne nord et de 9,8 % dans la couronne sud, contre seulement 2,3 % à Montréal.

Non seulement l’étalement urbain rallonge-t-il les trajets en voiture, mais il multiplie le nombre de véhicules sur la route. «Dans le cas d’une famille, les deux parents doivent avoir leur propre voiture pour se rendre au travail, explique Florence Junca-Adenot. Jeunes adultes, leurs enfants devront, eux aussi, se déplacer en voiture pour assister à leurs cours.»

Cette situation est d’autant plus inquiétante que les entreprises se déplacent également vers les banlieues, note-t-elle. Mais le fait de rapprocher les compagnies des employés ne réduit-il pas le problème de congestion? «Non, parce que ces entreprises ne sont pas concentrées en un lieu qui peut facilement être desservi par le transport en commun, comme c’est le cas au centre-ville de Montréal, répond Florence Junca-Adenot. Les grandes artères des banlieues, déjà congestionnées par les automobilistes se dirigeant vers Montréal, seront encore plus achalandées.»>

Qui a dit que 450 rimait avec sérénité?

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