Rencontre Jeunes Entrepreneurs : Restaurateur

Dans le cadre de notre nouveau rendez-vous Rencontre Jeunes Entrepreneurs, Jobboom part à la rencontre d’un Jeune Entrepreneur. Il nous dévoile son parcours, sa formation, les défis qu’il a dû relever et sa gestion des ressources humaines.
Ce mois-ci: Benoît Lemieux, chef et propriétaire du restaurant iX bistrot à Québec.

La restauration est l’industrie qui attire le plus de nouveaux entrepreneurs. Malheureusement, ce n’est pas toujours une mince tâche! Pour plusieurs d’entre eux, l’aventure ne sera pas couronnée de succès comme c’est le cas pour Benoît Lemieux, propriétaire et chef cuisinier du iX pour Bistro à Québec, en première position du palmarès des meilleurs restaurants de la ville de Québec sur TripAdvisor depuis 3 ans

Parcours

Jobboom : Comment avez-vous eu l’idée de vous partir en affaires?

Benoît Lemieux : Autour de l’âge de 35 ans, après quelques années passées à travailler dans divers métiers, dont celui de serveur, j’ai eu envie de retourner travailler en cuisine, mais pas celle d’un autre. J’avais envie d’avoir carte blanche avec mes menus, et devenir propriétaire est pas mal la seule façon d’y arriver. C’est la manière que j’ai trouvée pour garder la pleine créativité de mes plats, et toute l’autonomie dont j’ai besoin. Être le patron me donne aussi l’occasion de choisir les produits avec lesquels je veux travailler.

JB : Qu’est-ce qui distingue votre entreprise de la concurrence?

BL : Ce qui distingue le iX pour Bistro, c’est l’expérience que les clients viennent chercher. Ils ne viennent pas simplement pour la nourriture, mais aussi pour me voir cuisiner et pour la proximité et l’interaction qu’on a avec eux. Sinon, nous serions juste un autre resto de Québec. Nous avons réussi à trouver notre niche, notre clientèle. Celle qui vient pour notre offre et qui ne demande pas qu’on fasse des pieds et des mains juste pour leur plaire, celle qui nous permet de rester authentique dans notre approche.

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Et notre clientèle est principalement touristique. Ça a l’avantage qu’ils ont souvent pris connaissance du resto par des critiques ou des sites web; ils savent donc exactement à quoi s’attendre en venant. Et nous avons fait le choix de ne pas avoir de site web avec un menu détaillé pour deux raisons. D’abord, parce que ça laisse aux gens plus de temps sur place pour qu’on leur explique le menu en détails. Nous ne sommes pas un fast food, on veut que les gens aient les papilles gustatives en éveil à la seule écoute du menu. Et deuxièmement, ça nous permet d’être un peu plus créatifs avec un menu en mouvement selon les arrivages et les saisons. Quand le menu est fixé d’avance et disponible en ligne, on doit s’assurer d’avoir un inventaire de stock pour fournir toutes les options. Ça peut être risqué autant pour la fraîcheur que pour la rentabilité.

JB : Comment avez-vous obtenu votre financement de départ pour vous lancer en affaires?

BL : En fait, j’avais mis de l’argent de côté avant de me lancer en affaires, et j’ai eu du soutien de mes deux parents pour l’argent qui me manquait. Mais je ne me suis pas lancé dans les folles dépenses non plus. Je voulais que l’emprunt que je faisais représente moins d’une année de salaire. Comme ça, si jamais mon projet n’aboutissait pas, je n’aurais pas eu à rembourser une dette pendant des années. Et j’ai pris mon temps. J’ai loué mon local à la fin octobre 2011, mais je n’ai ouvert que l’été suivant. Ça m’a permis de travailler à temps plein comme serveur dans un autre restaurant pendant que je travaillais sur mon projet. J’ai ouvert au début sur les heures de dîner uniquement. Dès que j’ai eu mon permis d’alcool en août 2012, j’ai pu ouvrir officiellement et me consacrer à temps plein à mon entreprise.

JB : Quel genre de soutien avec vous eu?

BL : J’ai la tête dure parfois et je préfère faire comme ça me plait! Quand j’ai démarré mon restaurant, j’avais suffisamment acquis de connaissances en restauration pour pouvoir me débrouiller seul. Et je pense que même si j’avais eu un mentor qui m’avait donné des conseils, je ne serai pas rendu à la même place aujourd’hui, soit parce que j’aurais fait des choses qui ne me tentaient pas, soit parce que j’aurais reproduit un modèle d’affaires qui ne se démarque pas de la concurrence. Je suis fier de mon modèle d’affaires car il me ressemble.

Formation

JB : Quelle formation avez-vous suivie?

BL : J’ai fait un DEP en cuisine à Baie-Comeau et j’ai ensuite travaillé dans un restaurant qui s’appelle « La Cache d’Émilie » où j’ai eu la chance de travailler avec un saucier. Ça m’a permis rapidement d’apprendre beaucoup sur la dynamique de travail et sur la « survie » en cuisine. Puis après, je suis tout de même allé faire un BAC puis une maîtrise en géographie et histoire.

JB : Considérez-vous qu’il vous manque de la formation ou des cours d’appoint qui pourraient faciliter votre parcours d’entrepreneur?

BL : C’est certain que le DEP en cuisine ne m’a pas formé à devenir propriétaire de restaurant! Je pense que si j’avais suivi des cours de comptabilité ou de fiscalité d’entreprises à l’université, j’aurais aujourd’hui une meilleure compréhension de la rentabilité du restaurant. On ne peut pas toujours se fier à notre comptable pour être celui qui connaît toutes les détails fiscaux où on pourrait sauver dans les coûts. C’est pour cette raison qu’il est primordial de trouver un comptable en qui nous avons confiance et qui est spécialisé dans notre industrie afin de recevoir les meilleurs conseils de gestion.

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JB : Quelle a été l’erreur de laquelle vous avez le plus appris?

BL : Au début du démarrage de mon entreprise, j’avais malheureusement tendance à laisser de côté les détails administratifs et comptables. Mais ce laxisme m’a rattrapé un peu plus tard et j’en ai payé le prix! Mon conseil aux gens qui se partent en entreprise : si vous n’êtes pas doués et organisés du côté fiscal, trouvez-vous rapidement un comptable et confiez-lui toute la paperasse. Vous éviterez ainsi de payer des intérêts inutilement aux différents paliers gouvernementaux! Aussi, les comptables sont mieux placés pour savoir quelles sont les dépenses qui sont déductibles. Des fois ça peut paraître comme des économies de bout de chandelles, mais mis bout à bout, on réussit à en détacher une rentabilité.

JB : Quel est selon vous le meilleur coup que vous avez réussi pour faire rayonner votre entreprise?

BL : TripAdvisor a changé ma vie! Quand j’ai ouvert le restaurant, j’ai eu la chance d’avoir deux bonnes critiques dans les journaux Le Soleil et Le Voir. Mais ça m’a apporté de la clientèle sporadique seulement deux ou trois semaines après leur parution, sans plus. Mais plus les gens de l’extérieur venaient au resto et plus ils commentaient positivement leur expérience sur TripAdvisor. Quand j’ai atteint le top 5 des restaurants les mieux coté de Québec, j’ai vu toute une différence, le resto était plein tous les vendredis et samedis. Depuis que je suis le numéro 1, c’est plein tout le temps. J’ai même dû changer la formule et n’accepter que les gens sur réservation pour éviter que les clients ne se cognent le nez devant ma porte. En ce moment, mon carnet de réservation est plein pour les trois prochains mois.

Ressources humaines

JB : Combien d’heures par semaine consacrez-vous à votre entreprise? Est-ce que votre vie personnelle en souffre?

BL : Je travaille entre 60 et 65 heures par semaine, mais le resto est ouvert 5 jours pour nous laisser deux jours de congé. Je n’ai évidemment pas juste la cuisine à ma charge, mais aussi les commandes aux fournisseurs et la préparation. C’est certain que ma vie sociale et familiale en ressentent les effets secondaires. Comme c’est le cas pour tous les employés en restauration, on travaille toujours lorsque les autres sont en congé. C’est donc plus compliqué pour moi de pouvoir passer du temps avec ma fille et mes amis car la plupart de mes fins de semaine sont hyper chargées.

JB : Combien d’employés avez-vous présentement?

BL : Dans les premiers temps, j’étais tout seul. Je faisais la cuisine et le service. Mais des fois, lorsqu’il y avait trop de clients, je devais engager quelqu’un pour m’aider avec le service. C’est ainsi que j’ai engagé Vincent, qui est rapidement devenu partenaire avec moi dans le resto. Je l’avais engagé comme serveur ayant déjà travaillé avec lui dans un autre restaurant, notre complicité s’est rapidement concrétisée en partenariat tout naturellement.

Je trouvais que c’était plus simple et plus motivant pour lui. C’est difficile d’avoir un employé motivé qui va donner son 110% pendant 60h heures semaine s’il est simplement sur le « payroll ». En devenant partenaire avec moi, Vincent s’implique parce que c’est aussi à lui de mettre son énergie pour que notre affaire fonctionne. Ainsi, il s’autogère et s’investit autant que moi.

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JB : Est-ce difficile de prendre des congés ou de de gérer des absences telle qu’une journée de maladie?

BL : C’est certain qu’en étant seulement deux employés pour tout faire fonctionner, ça nous oblige à fermer de temps en temps. On profite des périodes plus creuses comme le mois de janvier pour prendre nos vacances et bloquer des dates au calendrier des réservations lorsque nous voulons prendre congé. Si Vincent doit s’absenter, je peux le remplacer temporairement par un serveur. Mais comme je suis méticuleux sur la qualité de ma cuisine, je n’oserais pas laisser à quelqu’un d’autre le soin de me remplacer si j’étais malade. Pour l’instant, ça n’est jamais arrivé. Lorsqu’un événement soudain survient, on rappelle nos clients et on essaie de leur trouver une autre date pour qu’ils puissent venir manger chez-nous.

JB : Comptez-vous augmenter le nombre d’employés dans les prochains mois?

BL : Non, mon modèle d’affaires est basé sur l’expérience intimiste que le client vient chercher. Si on commence à engager d’autres employés, on va non seulement se piler sur les pieds, mais aussi, je crains qu’on perde le charme du restaurant. Les gens viennent d’abord et avant tout pour la proximité avec nous deux. Si on dilue cette expérience, nous ne serons plus qu’un simple restaurant impersonnel comme tant d’autres. Si jamais j’engage quelqu’un, ça serait uniquement pour m’aider pour le ménage et la préparation.

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Sophie Goulet

Sophie est gestionnaire de marque pour Jobboom depuis 2016. Elle cumule plus de 16 ans d'expérience dans les différentes sphères de la communication, que ce soit dans le domaine du cinéma ou de l'entreprise privée.