Le stress n’est pas que dans la tête

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On aurait tort de minimiser l’état d’esprit des travailleurs qui se disent stressés, épuisés ou déprimés. Ces manifestations psychologiques sont bel et bien liées à des changements sur le plan physiologique, selon une étude menée par des chercheurs de l’Université de Montréal, de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal et de l’Université McGill.

L’équipe de recherche a fait remplir des questionnaires d’évaluation de la santé mentale à plus de 400 travailleurs issus de 35 entreprises. En parallèle, elle a analysé des échantillons de salive fournis par ces mêmes sujets à différents moments, que ce soit durant le travail ou les congés. « Notre objectif était de déterminer s’il y avait une correspondance entre les réponses inscrites dans les questionnaires et les concentrations d’une hormone de stress, le cortisol », explique Alain Marchand, professeur à l’Université de Montréal et chercheur à l’Institut de recherche en santé publique de cette université.

Sécrété en situation de stress, le cortisol est une hormone qui met l’organisme en alerte pour favoriser la réaction de combat ou de fuite. Il contribue aussi à réguler l’état de veille et de sommeil au fil de la journée. « Le cortisol est une adaptation évolutive qui sert à mobiliser l’énergie nécessaire pour survivre, explique Sonia Lupien, directrice du Centre d’études sur le stress humain de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal et professeure à l’Université de Montréal. Le problème, dans nos sociétés modernes, est que notre cerveau ne fait pas la différence entre un mammouth et un patron stressant.»

La réaction induite par le cortisol mobilise des ressources normalement attribuées à d’autres fonctions, comme la digestion ou le système immunitaire. Si elle est activée pendant une longue période, des problèmes de santé peuvent en découler.

Or, la manière dont on se sent se refléterait dans les niveaux de cortisol, selon les résultats de l’étude. Les personnes ayant répondu par l’affirmative à des questions visant à mesurer les symptômes de dépression et de détresse psychologique avaient des niveaux de cortisol plus élevés au réveil. Quant aux sujets dont les questionnaires révélaient un épuisement professionnel, ils se caractérisaient plutôt par de faibles taux de cortisol peu après le réveil. «Les travailleurs épuisés ne peuvent tout simplement plus mobiliser l’énergie nécessaire pour fonctionner de manière optimale », illustre Robert-Paul Juster, étudiant au doctorat à l’Université McGill qui réalise des travaux de recherche au Centre d’études sur le stress humain de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal.

À terme, ces résultats pourraient permettre de mieux utiliser les questionnaires pour détecter des problèmes de santé psychologique chez les travailleurs, estiment les auteurs. « Cette étude est une avancée pour les méthodes préventives, car elle démontre que les perceptions psychologiques subjectives des travailleurs correspondent bel et bien à des signatures biologiques objectives», précise Pierre Durand, membre du groupe de recherche de l’Institut de recherche en santé publique et de l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal.

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