Des employeurs prêts à décrocher la lune

Au Québec, les jeunes de 15 à 24 ans représentent 30 % du personnel des entreprises du commerce de détail. Ils sont vendeurs, commis ou caissiers, pour la plupart des employés qui passent en attendant de décrocher leur diplôme ou un autre emploi. Dommage, car l’industrie a de belles carrières à leur offrir.

Pour plusieurs, travailler dans le commerce de détail, c’est bosser toute sa vie comme vendeur. Erreur : l’industrie offre mille et une professions, en plus de valoriser le développement de carrière de son personnel avec des formations et des promotions à l’interne.

Les 54 000 établissements commerciaux au Québec sont aussi prêts à faire des pieds et des mains pour retenir leurs travailleurs. Ils n’ont pas le choix en raison du fort taux de roulement du personnel. La proportion de travailleurs à remplacer sur une base annuelle s’élève à 21 %, seulement pour le personnel de vente. Selon Détail Québec, le Comité sectoriel de main-d’œuvre du commerce de détail, le manque de candidats constitue la principale source d’inquiétude de 70 % des employeurs.

Les jeunes et la population en général connaissent mal l’étendue des perspectives professionnelles dans le commerce de détail. «Lorsqu’un consommateur entre en magasin, il fait affaire surtout avec les vendeurs et les caissiers, fait remarquer Gaston Lafleur, président du Conseil québécois du commerce de détail. Il n’a pas idée de l’ensemble des emplois du commerce de détail en ventes, achats, présentation visuelle, sécurité, gestion des marchandises et autres.»

Le commerce de détail est l’un des rares secteurs d’activité où une personne sans formation peut décrocher un premier poste de gestion après cinq ans d’expérience en moyenne.

Il précise qu’une centaine de postes différents sont offerts aux quelque 450 000 travailleurs de l’industrie, lesquels exercent dans une vingtaine de sous-secteurs, dont les boutiques de vêtements, les magasins d’électronique et d’électroménagers, les centres de rénovation et les magasins de meubles.

Certes, on embauche à la base, des vendeurs, des commis au service à la clientèle, des caissiers, des étalagistes et du personnel en entrepôt. «Mais peu de gens pensent aussi aux réceptionnistes, aux commis de bureau et commis comptables», souligne Patricia Lapierre, directrice générale de Détail Québec.

L’industrie accueille également de la main-d’œuvre dite spécialisée, comme des détectives privés et des enquêteurs à la prévention des pertes, poursuit-elle. On trouve aussi une variété de postes de supervision comme les gérants adjoints, les gérants des ventes, les gérants d’entrepôt, les chefs de rayon et les superviseurs de premier niveau. Le commerce de détail accueille également des professionnels tels que des coordonnateurs de logistique, des acheteurs et des comptables.

En haut de la pyramide trônent, entre autres, les superviseurs régionaux, les gestionnaires de systèmes informatiques et les directeurs de toute sorte (magasin, prévention des pertes, ventes et marketing, achats, finances, ressources humaines), les vice-présidents et présidents de compagnie.

Des ascensions rapides

Commencer au bas de l’échelle et gravir les échelons est toujours possible dans le commerce de détail. Rien n’oblige une caissière à le demeurer toute sa vie. Parlez-en à Julie Gravel, qui a été caissière à temps partiel chez Omer DeSerres pendant ses études en techniques de design d’intérieur. Une fois diplômée, elle a eu la surprise de se voir offrir un poste de technicienne en aménagement par l’entreprise et d’être promue par la suite chargée de projets, Aménagement, à 25 ans! Julie dessine des plans de magasins avec le logiciel Autocad et participe à l’aménagement et au choix du mobilier pour les 26 magasins DeSerres du Canada.

Même chose pour Annick Bélanger. Pendant son DEC en commercialisation de la mode, elle a travaillé à temps partiel comme vendeuse dans des boutiques de vêtements. Diplôme en poche, elle a décroché un poste de gérante adjointe aux Ailes de la mode, avant d’être promue chef de rayon et directrice adjointe de magasin. Elle est encore passée à une autre étape en 2006, en devenant superviseure de district pour le Groupe Dynamite. À ce titre, elle veille sur la rentabilité de 13 magasins des bannières Dynamite et Garage situés à Joliette, Terrebonne, Repentigny, Anjou et Rimouski.

Des histoires comme celles de Julie et Annick ne font pas figure d’exception. «Chez Future Shop, favoriser les promotions à l’interne fait carrément partie de la culture de l’entreprise, indique Thierry Lopez, directeur marketing pour le Québec. Notre président a déjà été vendeur. Notre directrice de magasin à Granby a débuté comme caissière. Parmi nos cadres, 80 % ont commencé au bas de l’échelle pour Future Shop.»

«Les employeurs aiment pouvoir déceler un talent au sein de leurs rangs et lui montrer les rouages du métier, observe Patricia Lapierre. Le commerce de détail est l’un des rares secteurs d’activité où une personne sans formation peut décrocher un premier poste de gestion après cinq ans d’expérience en moyenne. Par contre, les gens qui sont allés à l’école progressent plus vite», nuance-t-elle.

Parmi les formations qu’apprécient les détaillants, on trouve le DEP en vente-conseil, les programmes collégiaux (DEC et AEC) en gestion de commerce et en commercialisation de la mode de même que le certificat en commerce de détail.

Pour le meilleur…

Pour assurer leur relève, les entreprises du commerce de détail sont prêtes à beaucoup. Certaines offrent à leurs employés des bourses d’études, du mentorat, des stages au siège social, des programmes de formation personnalisés et des programmes de reconnaissance incluant des bonis, des prix, des voyages et des rabais sur la marchandise.

«Pour accroître le nombre de femmes dans nos rangs et les maintenir en emploi, nous avons créé le Réseau de leadership au féminin, indique Thierry Lopez. Grâce à ce réseau, les employées bénéficient notamment de programmes de mentorat et de diverses formations, par exemple sur les façons d’exercer leur leadership, de même que d’activités de réseautage entre employées.»

C’est connu, le commerce de détail n’offre pas des salaires très élevés. Mais d’après les personnes interrogées, les gens de talent qui s’investissent au travail s’en tirent bien. «Pour accroître son salaire et être promu, il faut sauter sur toutes les occasions de formation offertes au travail ou dans les établissements scolaires», conseille Patricia Lapierre.

«Depuis mes débuts comme gérante jusqu’à aujourd’hui, mon salaire a doublé, explique Annick Bélanger. Je bénéficie d’une réduction de 50 % sur les vêtements en boutique. De plus, j’ai droit à des avantages sociaux, dont un plan de soins médicaux et dentaires pour ma famille, un programme de REER, des congés de maladie et des journées personnelles.»

Même progression salariale pour Julie Gravel depuis ses débuts. Et chez Omer DeSerres, les employés ont droit à des assurances collectives, un fonds de pension et des congés de maladie, même s’ils n’y travaillent qu’à temps partiel.

Choisir le détail

Une chose est sûre, les travailleurs qui choisissent de faire carrière dans le commerce de détail ne s’ennuient pas, comme en témoignent Annick Bélanger et Julie Gravel.

«Je touche à tout, dit Annick : du recrutement à la formation du personnel, en passant par les ventes, l’administration, la comptabilité et la présentation visuelle des boutiques. Mes tâches sont diversifiées. En plus, je suis maître de mon horaire de travail. Je travaille les soirs et les week-ends à l’occasion seulement. C’est important, car cela me permet d’être présente pour mes deux filles, âgées respectivement de 7 ans et 21 mois.»

Julie Gravel a également trouvé grâce au commerce de détail une belle qualité de vie. «Je ne vis pas le stress et la pression que j’aurais en travaillant dans une firme de design. Mon emploi est directement en lien avec mes études. Et je me concentre sur ce que je préfère : le design de mobilier commercial.»

Se retrouveront-elles un jour à un poste de direction? Elles y rêvent… l’industrie aussi!

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