Organiser le party de Noël, un pari risqué

Attendu par certains, dénigré par d’autres, le party de Noël du bureau laisse rarement indifférent. Mais quoi qu’on en pense, cet événement incontournable cache toute une organisation. Participer à sa préparation peut devenir un atout professionnel, à condition de ne pas commettre d’impair.

Chaque année, à l’approche de la fête de bureau, Catherine Paillex devient insupportable, tant elle est stressée par l’organisation de l’événement, raconte-t-elle : «Chaque fois, je clame haut et fort que plus jamais je ne m’embarquerai là-dedans!» Et pourtant, cela fait cinq ans que cette spécialiste en contrats et procédures chez Croix Bleue Medavie s’occupe du déroulement de la fête de fin d’année avec d’autres collègues.

Au Québec, trois employés sur quatre sont conviés à un party de Noël par leur employeur, d’après l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. «Dans une entreprise, cet événement est une occasion de remercier les employés pour l’année qui vient de se terminer. Pour s’assurer que cela leur plaise, il est naturel de demander à plusieurs d’entre eux de s’impliquer dans les préparatifs», note Florent Francoeur, le président de l’Ordre.

Il est vrai que prévoir le repas, l’animation et les cadeaux pour une centaine de personnes a de quoi étourdir. Mais faire partie du comité d’organisation peut aussi se révéler gratifiant. «Le sentiment de réalisation que cela procure dépasse le stress subi les semaines précédant l’événement», assure Alain Gasse, analyste principal des systèmes de gestion, également chez Croix Bleue Medavie. Lui et sa collègue Catherine Paillex estiment y consacrer environ une soixantaine d’heures chacun au cours de l’année.

Jouer les organisateurs peut également être un moyen pour un nouvel employé de se faire un réseau de connaissances dans l’entreprise, souligne Marie-Josée Bélanger, conseillère en ressources humaines pour la firme Zone RH. «C’est aussi une belle occasion pour quelqu’un qui aimerait surmonter sa timidité», croit-elle. En effet, cela implique une collaboration étroite avec d’autres employés auxquels on n’aurait peut-être pas parlé autrement.

Révéler ses talents

L’organisation des festivités peut aller jusqu’à faire avancer une carrière, estime Florent Francoeur. «Une réceptionniste que l’on verrait négocier avec un fournisseur pour un repas pour 200 personnes, gérer un budget et travailler en équipe est susceptible d’impressionner la direction, qui pourrait éventuellement élargir son champ de responsabilités.»

Si vous avez tenu seulement une partie de vos engagements, c’est ce dont se souviendront les gens, même si vous y avez consacré de longues heures.
– Florent Francœur, président de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés

De la même manière, «une personne qui occupe un poste technique, mais qui fait du scrapbooking à la maison, aura l’occasion de faire connaître sa créativité. Il est probable que l’entreprise voudra y recourir lors d’un autre événement spécial», note Marie-Josée Bélanger.

D’après Florent Francoeur, il est utile de faire valoir cette expérience lors de son évaluation annuelle ou même en entretien d’embauche. Marie-Josée Bélanger conseille toutefois de ne pas mentionner simplement sa participation au comité du party de Noël dans son curriculum vitæ. «Certaines entreprises pourraient ne pas considérer cette activité comme une valeur ajoutée. Si l’on pense que cela peut nous servir, mieux vaut détailler les habiletés que l’expérience nous a permis de développer», suggère la conseillère en ressources humaines.

Prêter le flanc

Par contre, les membres du comité organisateur s’exposent aux critiques des convives. «L’an passé, alors que je prenais une pause cigarette à l’extérieur de la salle de réception, j’ai entendu quelqu’un dire que c’était nul. J’avoue que c’est enrageant quand on y a tellement travaillé. Mais il faut apprendre à vivre avec ça», confie Catherine Paillex.

Que ce soit à cause d’une fourchette sale ou d’un discours trop long, le party de Noël ne fait jamais l’unanimité, note Marie-Josée Bélanger. «Il peut même entraîner des frustrations, voire des conflits entre collègues, si les organisateurs prennent les commentaires de façon personnelle.»

Josée Lalande, elle, prévoyait le coup. Alors qu’elle était responsable des communications internes dans une entreprise forestière, elle s’est impliquée plusieurs fois dans l’organisation de la fête de bureau. Elle commençait par faire un sondage sur les attentes des autres employés et prenait soin de changer la formule d’une année à l’autre pour essayer de satisfaire le plus grand nombre. «La semaine suivant l’événement, il arrive que l’on entende des critiques, mais ça s’estompe au fil du temps. Cela ne m’a jamais porté préjudice à long terme.»

Pour sa part, Anne-Renée Laberge, coordinatrice de production chez Vox Montréal, plaide pour davantage d’indulgence envers le comité organisateur, duquel elle a fait partie à plusieurs reprises. «C’est dommage que les gens se plaignent, car nous sommes seulement des volontaires, pas des professionnels!» Selon elle, les critiques peuvent décourager certaines personnes de renouveler leur implication.

Tenir ses promesses

Des partys de bureau qui tournent mal à cause du manque d’expérience des employés, Cynthia Daoust, propriétaire de la firme d’organisation d’événements pour les entreprises Sphéria Événements, en a entendu parler. «Une réception ratée à cause d’un mauvais choix de salle, par exemple, peut nuire à la réputation d’un travailleur, car les autres retiendront surtout ce faux pas», dit l’experte-conseil. Une cliente lui a même déjà confié que son ancien employeur avait perdu confiance en elle parce qu’elle avait oublié plusieurs détails de l’organisation.

Bref, s’engager dans une telle aventure n’est pas sans risque, qu’il s’agisse d’épuisement (burn-out) dû au surplus de travail, de frustration de ne pas pouvoir profiter pleinement de la fête ou de déception si l’événement n’est pas à la hauteur des attentes. Selon Cynthia Daoust, on s’évitera des tracas en faisant appel à un professionnel qui travaillera de concert avec quelques employés.

Mais quelle que soit la formule choisie, l’important est d’aller au bout de ses engagements, selon Florent Francœur : «Si vous avez tenu seulement une partie de vos engagements, c’est ce dont se souviendront les gens, même si vous y avez consacré de longues heures.» Attention, donc, de ne pas s’en mettre trop sur les épaules, d’autant plus qu’entre la course aux cadeaux et les préparatifs de la fête familiale, le temps des fêtes n’est pas de tout repos!

À faire

  • Planifier le déroulement de la soirée bien à l’avance et déléguer plusieurs tâches pendant l’événement afin de pouvoir soi-même en profiter.
  • Savoir laisser sa place à d’autres l’année suivante. Être systématiquement associé à l’organisation du party de Noël peut en faire oublier nos autres atouts, selon Marie-Josée Bélanger, consultante en ressources humaines.
  • Travailler en équipe, écouter les idées des autres.
  • Faire un sondage après l’événement pour permettre au comité de s’ajuster l’année suivante.

 

À ne pas faire

  • Avoir un bar ouvert. Flirt entre collègues, propos déplacés : les dérapages sont plus probables quand l’alcool coule à flots.
  • S’y prendre trop tard. Certains éléments comme la réservation de la salle ou du traiteur doivent se planifier un an à l’avance.
  • Ne pas tenir ses engagements. Mieux vaut en prendre moins, mais aller jusqu’au bout.

 

Pratiques les plus courantes dans les entreprises

Selon Florent Francoeur, président de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, il existe plusieurs formules d’organisation de la fête de Noël du bureau.

  • L’employeur prend en charge l’événement par l’intermédiaire des ressources humaines.
  • Le comité social, composé d’employés s’étant portés volontaires, s’occupe des préparatifs de A à Z, en rendant des comptes à la direction, notamment pour la gestion du budget.
  • La formule hybride : le comité d’organisation est composé de personnes des ressources humaines et d’employés d’autres secteurs.
  • Les employés peuvent préparer l’événement pendant les heures de travail ou avoir à y consacrer de leur temps personnel. C’est selon la politique de l’entreprise, il n’y a pas de réglementation sur la question.

 

L’échéancier du comité

  • Un an avant : formation du comité, analyse des réponses au sondage, étude du budget, plan de financement si l’employeur ne paye pas, quête de soumissions pour la salle, le traiteur, l’animation de la soirée (groupe de musique, DJ, artistes de cirque, etc.).
  • À partir d’octobre : réunion aux deux semaines, choisir la formule concernant le transport et l’alcool.
  • À partir de novembre : réunion toutes les semaines, achat des cadeaux, scénario de la soirée.
  • Après la réception : sondage auprès des employés.

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