Affronter un marché du travail au ralenti

Difficile de savoir dans quel contexte un diplômé fera son entrée sur le marché du travail. Mais, même si l’économie tourne au ralenti, il est possible de mettre toutes les chances de son côté pour trouver un premier emploi dans son domaine. À condition de saisir les occasions pendant ses études!

«En période d’instabilité économique, on n’est jamais assez préparé pour sa recherche d’emploi. À ma sortie de l’université, j’ai vite réalisé que je devais envoyer une trentaine de CV pour recevoir deux appels», raconte Étienne Gaouette, qui a terminé un baccalauréat en ressources humaines en 2005, puis une maîtrise en intervention et changement organisationnel en 2007, à l’Université de Sherbrooke.

«À cette époque, les entreprises commençaient à appréhender l’impact du ralentissement économique chez nos voisins du sud. Et je l’ai bien senti pendant ma recherche d’emploi», précise-t-il.

C’est important de s’engager à fond dans son stage pour se démarquer et se rendre indispensable dans l’entreprise, en commençant par bien s’intégrer à l’équipe en place.
— Stéphanie Gaouette, agente de liaison, Place aux jeunes en région

Heureusement pour lui, Étienne ne s’est pas contenté d’envoyer des CV et d’attendre patiemment les appels. Pour rester actif, il s’est engagé bénévolement dans l’organisation du colloque annuel de l’Association des gestionnaires en ressources humaines de l’Estrie. C’est grâce à ce nouveau réseau de connaissances qu’il a appris qu’un poste permanent dans son domaine était disponible à Montréal. «J’ai accepté de m’éloigner pour avoir ma première expérience en ressources humaines», dit-il. En utilisant des méthodes moins traditionnelles, la recherche d’Étienne n’a finalement mis que trois mois avant de donner des résultats.

Son histoire illustre bien deux règles fondamentales de la recherche d’emploi en temps de crise : rester ouvert à des postes à l’extérieur de sa région et miser sur ses relations. Avec le recul, Étienne réalise l’importance de développer son réseau pendant ses études. «J’ai des collègues qui l’ont fait durant leur formation. Quand ils ont terminé l’université, grâce à leurs contacts, ils ont décroché un premier emploi plus vite que moi et près de chez eux, en Estrie.»

Tirer profit des stages

Profiter des stages d’études est un autre bon moyen d’amorcer sa recherche d’emploi. C’est souvent la porte d’entrée pour accéder à un emploi lorsque l’économie ralentit. «Même si, en période de récession, les employeurs concentrent leurs efforts à retenir leurs employés les plus performants, ils restent ouverts aux stages de formation. Beaucoup de stagiaires demeurent ensuite en poste parce qu’ils ont réussi à se démarquer et à se faire une place dans l’entreprise», précise Florent Francœur, président-directeur général de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA).

Mais pour séduire les employeurs, il faut jouer les bonnes cartes. «C’est important de s’engager à fond dans son stage pour se démarquer et se rendre indispensable dans l’entreprise, en commençant par bien s’intégrer à l’équipe en place. Il faut rester ouvert et proactif pour montrer qu’on est prêt à apprendre, en posant des questions et en manifestant son intérêt à relever des défis», ajoute Stéphanie Gaouette, agente de liaison pour Place aux jeunes en région de la Capitale-Nationale, un organisme qui accompagne ceux qui veulent une première expérience de travail hors des grands centres urbains.

La polyvalence : un plus

Florent Francœur rappelle aussi que les organisations n’ont pas beaucoup de temps pour la formation et l’encadrement en période de turbulences économiques. Les candidats débrouillards, autonomes et capables d’aller chercher de l’aide au besoin ont une longueur d’avance. De bonnes aptitudes pour la communication et le travail d’équipe sont aussi des atouts pour se tailler une place.

Chercher un emploi est, en fait, un travail à temps plein, récession ou pas!
— Mélanie Forest, conseillère en emploi, Carrefour jeunesse-emploi

Dès le début de ses études, il faut saisir les occasions de développer ce savoir-être qui fera la différence, en s’impliquant dans les associations étudiantes ou les activités parascolaires, par exemple. «On peut aussi faire du bénévolat dans un organisme d’entraide, dans son ordre professionnel ou dans une organisation comme le Forum jeunesse de sa région, un groupe de concertation qui coordonne des projets et défend les intérêts des jeunes de 12 à 30 ans», énumère Stéphanie Gaouette. Autant d’expériences à faire ressortir dans son CV. Car, quand 20 diplômés convoitent le même poste, celui qui a travaillé bénévolement, tout en poursuivant ses études, est avantagé.

Miser sur le marché caché

Quand l’économie se porte moins bien, l’affichage traditionnel d’offres d’emploi suit la même tendance. Il faut donc redoubler d’efforts pour débusquer des postes dans le marché caché. «On estime qu’on trouve 70 % des emplois grâce à nos relations, qu’elles soient dans notre entourage ou dans les réseaux sociaux», indique Mélanie Forest, conseillère en emploi au Carrefour jeunesse-emploi de Laval.

Il faut donc faire savoir que l’on cherche du boulot. Et du côté des réseaux sociaux, on privilégie LinkedIn à Facebook, soutient Stéphanie Gaouette. «Les jeunes diplômés ont intérêt à afficher leur profil professionnel sur LinkedIn et à le maintenir à jour. Les recruteurs utilisent ce réseau pour dénicher de bons candidats», indique-t-elle.

Les candidatures spontanées constituent un autre moyen pour découvrir les emplois dans le marché caché. On dresse une liste d’entreprises qui nous intéressent et on va y porter son CV, même s’il n’y a pas d’offres d’emploi.

«Les employeurs se constituent toujours une banque de candidatures. Si un poste se libère, ils iront piger dans cette banque avant de recruter à l’externe», indique l’agente de liaison de Place aux jeunes.

Chercher de l’aide

Peu importe la situation économique, la recherche d’emploi exige une bonne dose de confiance en soi. «Il faut bien se connaître, savoir parler de ses forces, définir ses limites et avoir un CV et une lettre de présentation adaptés à chaque offre d’emploi», dit Stéphanie Gaouette.

Il est possible d’aller chercher de l’aide pour se préparer. Chaque établissement d’enseignement possède un service de placement qui offre une kyrielle de solutions pour outiller les étudiants. «On peut se créer un profil dans le système informatique du service de placement et commencer à consulter les offres d’emploi pour se familiariser avec les exigences des employeurs. C’est important de réaliser cette étape assez tôt pour commencer à développer les aptitudes recherchées durant sa formation», avance-t-elle.

«Certains services de placement proposent également du mentorat pour des jeunes qui souhaitent être parrainés par un professionnel d’expérience dans leur domaine. C’est une belle occasion d’élargir son réseau de connaissances et de se brancher sur le milieu qui nous intéresse», estime Stéphanie Gaouette.

«Il faut s’armer de patience et y mettre du temps et de l’énergie. Chercher un emploi est, en fait, un travail à temps plein, récession ou pas!», rappelle Mélanie Forest.

Pourquoi le taux de chômage des 15-24 ans
est-il toujours plus élevé?

Selon Emploi-Québec, en 2011, le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans atteignait 13,4 %, comparativement à 7 % pour les 25 à 34 ans. «Souvent encore aux études, les 15-24 ans ont moins d’expérience lorsqu’ils font leur entrée sur le marché du travail. Ils occupent des emplois à temps partiel, saisonniers ou contractuels qui, par la force des choses, peuvent entraîner une période de chômage entre deux contrats», explique Louis-Philippe Tessier-Parent, économiste à la Direction de l’analyse et de l’information sur le marché du travail à Emploi-Québec.

En période de récession, ajoute-t-il, cet écart devient plus marqué parce que ce groupe d’âge, moins expérimenté et comptant moins d’ancienneté, est le plus visé par les mises à pied.

Taux de chômage au Québec

15-24
ans
25-34
ans
Ensemble de la population
âgée de 15 ans et +
2007 12,5 % 6,8 % 7,2 %
2008 12,1 % 6,5 % 7,2 %
2009 15,2 % 7,6 % 8,5 %
2010 13,9 % 7,4 % 8,0 %
2011 13,4 % 7,0 % 7,8 %

Source : Emploi-Québec

Un emploi garanti?

Étudier dans une formation d’avenir peut faciliter l’obtention d’un emploi dans son domaine. Mais ce n’est pas une garantie!

Chercher du travail, peu importe son domaine d’études, demande une bonne attitude, de la préparation et des efforts, note Mélanie Forest, conseillère en emploi au Carrefour jeunesse-emploi de Laval.

Si certains diplômés restent coincés au fil de départ, il y a fort à parier qu’ils se sont mal préparés aux exigences de base du processus d’embauche. «Ils ont un CV mal fait, avec des fautes d’orthographe, ou bien ils sont incapables de nommer leurs forces et leurs limites en entrevue. Ces personnes ne se connaissent pas et manquent de préparation», estime Florent Francœur, président-directeur général de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.

En entrevue, c’est ce genre de détails qui permettent au recruteur d’éliminer certaines candidatures pour conserver la meilleure. La façon de s’exprimer, de se présenter, d’être à l’écoute et de poser des questions est prise en compte.

«Malgré les difficultés, le chercheur d’emploi doit conserver une attitude positive et, surtout, ne doit pas se décourager. Il a tout intérêt à rappeler l’employeur pour savoir ce qui n’a pas bien fonctionné en entrevue afin qu’il puisse s’améliorer», souligne Mélanie Forest. Question d’ajuster le tir pour la prochaine fois!

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