Reprise anticipée

Le secteur de l’aérospatiale québécois semble avoir du plomb dans l’aile depuis quelques mois, notamment à cause de l’annonce de nombreuses mises à pied. Loin de piquer du nez, l’industrie attend la reprise économique pour gagner rapidement en altitude.

Alors qu’à l’automne 2008 le Comité sectoriel de main-d’œuvre en aérospatiale du Québec (CAMAQ) prévoyait l’ouverture d’environ 6 000 nouveaux postes jusqu’à la fin de 2009, l’aérospatiale a connu plutôt d’importantes réductions d’effectifs. Près de 4 000 emplois ont été perdus au début de cette année uniquement chez les principaux joueurs de l’industrie au Québec, soit 1 000 chez Pratt & Whitney, 500 chez Bell Helicopter et 2 400 chez Bombardier Aéronautique.

La récession mondiale a poussé des acheteurs à réduire ou à reporter leurs commandes d’avions et d’hélicoptères. L’impact s’est rapidement fait sentir sur les chaînes de production. La majorité des pertes d’emplois ont touché les travailleurs des usines. Les ingénieurs et les techniciens spécialisés, qui conçoivent et préparent les nouveaux produits, sont épargnés pour l’instant.

«Contrairement à d’autres secteurs industriels, quand il y a un ralentissement, on stoppe la production. Dès qu’il y a reprise, on redémarre immédiatement parce qu’il n’y a pas de réserve d’avions ou d’hélicoptères à écouler», explique Eric Edström, chargé de projet au CAMAQ.

Recherche et développement

Mais que faire en attendant que les carnets de commandes se remplissent à nouveau? Loin d’être au point mort, l’industrie met les bouchées doubles en recherche et développement et dans la formation des employés.

La liste de projets est longue : 149 M$ sur 5 ans pour développer des systèmes avioniques chez Esterline CMC Électronique, 575 M$ et 565 emplois créés en 5 ans chez Pratt & Whitney pour un centre aéronautique ultramoderne à Mirabel, sans oublier le nouvel avion CSeries de Bombardier.

Et les emplois suivent. Déjà, Bombardier prévoit 600 nouveaux postes cette année pour la production de ses avions CSeries et Learjet 85, en plus de recruter 230 employés pour la finition de ses appareils Global à Montréal. «Malgré la conjoncture économique, on a quand même près de 830 postes ouverts», affirme Sylvie Gauthier, directrice des communications externes chez Bombardier Aéronautique.

Chez Bell Helicopter, l’embauche à déjà recommencé dans tous les secteurs de l’usine de Mirabel touchés par des suppressions de postes. «Dans les prochains mois, si tout se déroule bien, on devrait engager 500 personnes. Celles qu’on vient de mettre à pied seront privilégiées», assure le directeur du développement des affaires, Michel Legault.

Les experts de l’industrie sont persuadés que l’aérospatiale du Québec reprendra vite le chemin de la croissance et embauchera à nouveau.

Reprise anticipée

Les experts de l’industrie sont persuadés aussi que l’aérospatiale du Québec reprendra vite le chemin de la croissance et embauchera à nouveau. Le besoin d’ingénieurs ne devrait pas diminuer, tandis que les employés des métiers seront demandés dès que les commandes recommenceront. «Les fondations de notre secteur aérospatial sont très solides», affirme Mehran Ebrahimi, directeur du groupe d’études en management des entreprises de l’aéronautique à l’UQAM.

Selon lui, le ralentissement que connaît l’industrie québécoise en 2009 est conjoncturel, comme les périodes creuses des années 1990 et après le 11 septembre 2001. «Dès qu’il y aura reprise, nous serons bien situés pour en profiter parce que nous avons un secteur qui est très dynamique et très innovateur.»

Rester à l’école

Les entreprises craignent que les étudiants boudent l’aérospatiale devant l’avalanche de mauvaises nouvelles. Ils manqueraient alors à l’appel au moment de la reprise, quand elles chercheront des milliers de candidats qualifiés.

Le personnel scientifique devrait être particulièrement demandé, selon le CAMAQ. «On veut que les jeunes persévèrent, restent et s’inscrivent dans les écoles pour être prêts d’ici à un an, quand l’industrie reprendra son envol», insiste Suzanne Benoit, directrice générale d’Aéro Montréal, la grappe aérospatiale du Grand Montréal.

«Les perspectives demeurent bonnes et je suis convaincu que dans trois ans – pour ceux qui s’inscriraient à l’automne 2009 – ça risque d’être pas mal réglé», avance le directeur de l’École nationale d’aérotechnique, Serge Brasset.

«Quand on s’inscrit en ingénierie, il faut avoir une vision à long terme et le secteur de l’aérospatiale est extrêmement intéressant pour les mordus des sciences appliquées», renchérit Maryse Deschênes, directrice du Service des stages et du placement à l’École Polytechnique.

«Bon an mal an, il y a plus de 1 500 emplois à remplacer, souligne Eric Edström, que ce soit des départs à la retraite ou des personnes qui changent de secteur industriel. Même s’il n’y avait pas de croissance et qu’on restait avec le même nombre d’emplois, il y aurait de 1 000 à 1 500 postes à pourvoir.»

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