Programme professionnel en comptabilité : course de fond

Baccalauréat en poche, vous vous lancez avec enthousiasme dans le programme professionnel, dernière étape avant l’obtention d’un titre de CA, CGA ou CMA. Mais de bons résultats au baccalauréat ne sont pas garants de succès au programme professionnel de deuxième cycle. C’est un parcours intensif et parsemé d’embûches. Comment le franchir avec succès?

Les exigences au deuxième cycle sont plus élevées qu’au baccalauréat, tant sur le plan universitaire que personnel. Chantal Bacon, coordonnatrice du programme de deuxième cycle d’études supérieures spécialisées en sciences comptables (CGA) de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG-UQAM), explique en effet que les règlements sont différents. Les étudiants doivent conserver une moyenne minimale de 2,7 sur 4,3 tout au long du programme, sous peine d’en être exclus. De plus, les notes ne s’échelonnent plus de A+ à D, mais de A+ à C. Et comme il est impossible d’annuler des cours, pas moyen de se défiler! De son côté, la coordonnatrice du programme d’études supérieures spécialisées en comptabilité publique à HEC Montréal, Hélène Racine, CA, souligne que la charge de travail (lecture, travaux) double au deuxième cycle.

Changement d’approche

Sur le strict plan universitaire, le défi est donc de taille. Mais c’est pourtant davantage sur le plan de l’approche que certains étudiants se cassent les dents. Finis les examens où il suffit d’apprendre la matière par cœur pour réussir. «On fait de l’analyse de cas, et chaque cas est unique», explique Hugo Castonguay, candidat CA, qui a étudié à l’Université Laval et travaille pour le cabinet Mallette. «Il n’y a pas de réponse toute faite. Il faut faire appel à toutes les connaissances acquises au baccalauréat et les utiliser pour résoudre des problèmes. On ne peut pas vraiment se préparer en étudiant quelque chose de spécifique. C’est déstabilisant», dit-il.

Danielle Gagnon-Valotaire, CA, directrice intérimaire du diplôme d’études supérieures spécialisées en sciences comptables (CA) à l’ESG-UQAM, connaît bien cette angoisse des élèves qui arrivent du baccalauréat. «Les cours sont axés sur les compétences plus que sur les connaissances. Les étudiants doivent apprendre à utiliser des notions variées touchant à la comptabilité, à la gestion, à la fiscalité et à bien d’autres domaines. Je dis souvent aux étudiants : au baccalauréat, vous aviez soixante tiroirs. Maintenant, vous avez une grande valise.»

Rien ne sert de courir, il faut partir à point

Sophie Beauregard, candidate CMA, achève son stage chez Lyrco Nutrition, à Saint-Valérien-de-Milton. Elle a terminé première au Québec, en 2010, à l’Épreuve d’analyse de cas. Selon elle, le secret de la réussite est simple : discipline. «La gestion du temps est primordiale. Il ne faut pas remettre ses lectures à plus tard, par exemple. Car il devient vite difficile de rattraper le temps perdu.»

Patricia Michaud, CA, responsable des programmes d’études avancées en sciences comptables à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR), note que les étudiants se font remettre, dès les premières semaines, la liste des travaux de session à faire. Or, certains, plutôt que de s’y mettre rapidement, reportent le travail à plus tard, et sont vite dépassés par les événements. Elle suggère de préparer un calendrier de travail, et surtout… de le suivre! Certains étudiants ont en effet la fâcheuse habitude d’élaborer un plan de travail impeccable, qu’ils délaissent à la première occasion. «Faites une liste de tout ce que vous avez à faire, puis remplissez votre agenda en commençant par ce qui est prioritaire.»

«Je crois qu’on doit garder un rythme constant, mais raisonnable. Il y en a qui se brûlent. Il ne faut pas se décourager non plus. Ce n’est pas parce qu’une semaine a mal été que la suivante sera pareille!»
— Hugo Castonguay, candidat-CA

C’est d’autant plus crucial si l’on combine les études avec un stage à temps plein, comme l’a fait Christine Gilbert, CMA, lors de son passage au Programme de leadership stratégique de l’Ordre des CMA. «Les fins de semaine de formation intensive chevauchaient souvent des périodes de travail surchargées, comme les fins de mois. Je faisais un stage chez Cascades, à Memphis, et je me souviens d’avoir dû prendre l’avion un jeudi soir pour revenir au Québec, travailler dans l’avion sur mes états financiers en dirigeant mon équipe à distance, faire ma fin de semaine de cours et me rendre au siège social de Cascades, le lundi, pour terminer et déposer les états financiers de la division de Memphis!»

Plus qu’un sprint, le programme professionnel est donc un marathon. Pour s’assurer de s’améliorer tout au long du parcours, voici deux conseils à suivre : revoir les cas sur lesquels on a travaillé une fois qu’ils ont été corrigés, et œuvrer en équipe. «Portez une attention particulière aux commentaires des correcteurs pour comprendre ce qui n’a pas fonctionné dans une analyse de cas, afin de corriger le tir à l’examen», suggère Hélène Racine. Les collègues de classe sont aussi une ressource importante, selon Patricia Michaud. «Les étudiants ont tous le même objectif : réussir l’examen, rappelle-t-elle. La notion de compétition est beaucoup moins présente qu’au premier cycle. En travaillant en équipe, les étudiants peuvent confronter leurs idées et travailler sur leurs faiblesses.»

S’engager à temps plein

L’intensité de l’engagement est un facteur clé dans la réussite. «Les étudiants doivent en quelque sorte suspendre leur vie pendant la durée du programme, martèle Danielle Gagnon-Valotaire. On ne se marie pas, on n’organise pas un déménagement monstre, et on n’achète pas un immeuble d’appartements pendant cette période! On se concentre sur les études. Cela représente un sacrifice, mais c’est une carrière qui est en jeu.»

Afin que les amis et la famille comprennent que l’on n’est pas soudainement devenu ermite par conviction, il est nécessaire de mettre cartes sur table dès le départ, selon Patricia Michaud. «Cela permet de placer nos limites et de nous assurer que notre entourage comprend ce que nous essayons d’accomplir et les sacrifices nécessaires pour y arriver.»

Vous avez des alliés

Si les défis sont nombreux dans ces programmes, les étudiants peuvent compter sur beaucoup d’alliés. Les professeurs et responsables de programmes, les autres étudiants ou encore les collègues de travail sont des ressources aisément accessibles, qui peuvent donner un bon coup de main. Certaines universités proposent des équipes d’aide, comptant parfois jusqu’à 70 anciens étudiants, qui peuvent répondre à des questions ou aider à améliorer certaines compétences spécifiques. Ces établissements offrent aussi des services à la vie étudiante, des centres de gestion de carrière, des associations étudiantes.

Dans certains cas, d’autres types d’appuis sont fournis, comme un psychologue sportif! C’est le cas à l’UQAR, explique Patricia Michaud. «Pour préparer les candidats à l’examen, il leur parle de gestion de stress, de visualisation, et leur donne des techniques pour faire face aux impondérables et aux éléments qu’ils ne peuvent pas contrôler.»

Mais selon Sophie Beauregard, ce qui aide le plus à la réussite, c’est l’amour de ce que l’on fait. «J’ai adoré mon expérience et je trouve que c’est l’essentiel : il faut aimer cela. C’est un très beau défi et le temps passe vite!»

UN DANGER : LE STRESS

Pour sortir indemne de cet exigeant programme, on doit aussi apprendre à gérer son stress. «Il ne faut pas trop en faire, souligne Hugo Castonguay. Certains étudiants voient cela trop gros. Je crois qu’on doit garder un rythme constant, mais raisonnable. Il y en a qui se brûlent. Il ne faut pas se décourager non plus. Ce n’est pas parce qu’une semaine a mal été que la suivante sera pareille!»

Chantal Bacon insiste quant à elle sur l’importance d’intégrer des activités sportives dans son quotidien. «Il faut être en forme physiquement pour être en forme psychologiquement. L’un ne va pas sans l’autre.» Sa collègue Danielle Gagnon-Valotaire indique qu’il faut savoir créer un bon équilibre entre les études, le sport, les sorties avec les amis. «Il faut s’aérer l’esprit aussi, et rire!»