Les travailleurs québécois sous-payés?

Incapables de se négocier un meilleur sort, les travailleurs québécois perdraient 6000 $ par année en ne bénéficiant pas pleinement des gains de productivité des entreprises.

Ce point de vue est mis de l’avant par Mathieu Dufour, chercheur associé à l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS), dans une note publiée mardi matin.

En se penchant sur des données de Statistique Canada, M. Dufour relève que le produit intérieur brut par heure travaillée a augmenté de plus de 30% de 1981 à 2010. Il est ainsi passé de 100 $ à un peu plus de 130 $. Les chiffres sont ajustés pour tenir compte de l’inflation.

Pendant la même période, la rémunération en salaires et avantages sociaux aurait progressé de 15%, soit la moitié des gains. La rémunération aurait ainsi pris du retard de 1981 à 2000, pour s’aligner sur la productivité par la suite.

L’IRIS soutient qu’une hausse de productivité devrait être rentable pour tous.

«Ça permettrait aux revenus des entreprises et des travailleurs d’augmenter de 30% [en même temps], avance Mathieu Dufour. Lorsque l’on dit que ces derniers ont eu seulement 15% d’augmentation, les entreprises ont vu leurs revenus augmenter davantage.»

Handicap ?

Un taux de chômage élevé et des récessions auraient empêché les travailleurs de pouvoir négocier davantage. Un recul du chômage aurait rétabli l’équilibre dès 2000. D’autre part, le système d’assurance-emploi est devenu moins généreux, ce qui pousserait les gens à accepter une rémunération moindre pour demeurer actifs.

Le document ne dit toutefois rien quant à l’effet de l’investissement sur la productivité.

«On ne peut pas vraiment faire cela, soutient M. Dufour. Dans une entreprise, la production se fait avec une équipe et de la machinerie. Il est impossible de différencier les sources [de gains de productivité]. D’ailleurs, ce n’est jamais sur cette base que la rémunération est établie.»

S’il ne peut isoler les chiffres, le chercheur suggère des solutions d’ensemble au gouvernement. «Plutôt que de lancer des politiques qui érodent le filet social, il devrait cibler l’augmentation des conditions de vie sans miner le pouvoir de négociation. On peut penser à de meilleurs programmes de formation et à une meilleure accessibilité aux études supérieures.»

Des faiblesses

Il faut approcher l’étude avec prudence parce que des progrès comme ceux de l’informatique ont créé de la richesse, explique la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI).

«Ça peut être l’achat de machinerie plus performante, plutôt que le travail lui-même, qui fait en sorte que la productivité augmente», rappelle Martine Hébert, vice-présidente pour le Québec à la FCEI.

Mme Hébert soutient aussi que les employeurs ne peuvent pas toujours être généreux lorsqu’ils améliorent leur rendement. «Les employeurs paient des charges comme des fonds de services de santé et de santé-sécurité. Dans la réalité quotidienne, le transfert à 100% des gains ne peut être effectué.»

Les employés ne sont pas laissés pour compte, dit Simon Gaudreault, économiste à la FCEI. «L’économiste Pierre Fortin a déjà mentionné que les heures de travail ont reculé de 12% de 1974 à 2010, alors que le salaire moyen a monté de 9%. C’est aussi à considérer.»

(Source Michel Munger/Argent CanoË)

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