Le printemps amoureux

Il existe toutes sortes de printemps. À part notre très attendu printemps érable, saison emblématique d’espoir et de renaissance, il y a eu le printemps de Prague, prélude à la révolution de velours. Aussi le printemps de Jasmin, qui a mené à la révolution de Jasmin, puis semé tout le printemps arabe.

Mais il en existerait un autre, dont on parle moins, qui marque pourtant une petite révolution dans la vie de bien des gens : le printemps amoureux!

C’est du moins ce que laisse entendre une étude menée par un journaliste londonien, spécialiste en cueillette de données, qui s’est amusé à scruter les contenus de 10 000 statuts Facebook. Son analyse – ô combien triviale mais révélatrice – lève le voile sur une face cachée de la célèbre «saison des amours» : beaucoup de bien-aimés ne se contentent pas, lors du grand ménage printanier, de nettoyer les carreaux. Ils en profitent pour sauter par la fenêtre et prendre la poudre d’escampette! Bye mon amour, c’est fini.

Le graphique tiré de cette recherche illustre que c’est au printemps, autour de la semaine de relâche, qu’il est plus souvent question de rupture dans les statuts des abonnés.

Autant que dans les semaines qui précèdent Noël, l’autre sommet annuel du sabordage amoureux.

Une autre étude vient aussi refroidir ce grand lieu commun sur le printemps : ce supposé «dégel du corps» qui réveille la sève et met les Québécois «en rut» dès que la température grimpe au-dessus de zéro.

Figurez-vous que notre période de rut, si une telle chose existe encore, est plutôt en automne, entre la chute des feuilles et le mousseux du Nouvel An. La preuve : c’est neuf mois plus tard qu’il naît le plus d’enfants au Québec, selon l’Institut de la statistique. Ironiquement, selon ce même raisonnement, c’est au temps des bourgeons que les Québécois sont le moins actifs au lit. Allez savoir!

Si votre couple est bancal en hiver, probable qu’il cédera comme l’embâcle au printemps. Avec les dommages collatéraux qu’on connaît.

C’est à se demander si, à l’arrivée des beaux jours, les gars ne font qu’angoisser sur le BBQ et les filles sur leur cellulite. Mais ce serait sauter aux conclusions. Comme dit le proverbe, une hirondelle ne fait pas le printemps…

Mais il reste qu’à la lumière des épanchements qu’on trouve sur les forums Web et dans les colorés courriers du cœur, si votre couple est bancal en hiver, probable qu’il cédera comme l’embâcle au printemps. Avec les dommages collatéraux qu’on connaît : pour celui qui reste derrière, une zone sinistrée communément appelée la séparation, la peine d’amour ou la fin du monde.

Il n’y a pas de saison idéale pour vivre ce truc immonde qu’est un rejet amoureux. (Quoique l’hiver soit plutôt commode : on peut passer trois mois roulé en boule sur son canapé et toujours sembler normal…) Mais se faire larguer au printemps? Qu’y a-t-il de plus cruel que de devoir errer seul sous un soleil radieux, devant un été vidé de tout projet – outre celui d’apprendre à vivre sans la personne qu’on aime?

Ouch.

On le sait, on l’a tous appris à nos dépens, un chagrin d’amour fait mal. Mais maintenant on apprend que ça fait mal pour de vrai! La douleur liée au rejet amoureux serait aussi réelle que celle découlant d’une blessure corporelle, démontrent de récentes études américaines.

Au moyen d’un échantillon de volontaires au cœur brisé et d’un appareil d’imagerie cérébrale, des scientifiques ont constaté que de ressasser ses souvenirs en regardant la photo d’un ex fait aussi mal qu’une brûlure au bras! Du moins, ces deux «tortures» font réagir les mêmes zones du cerveau, soit celles qui gèrent la douleur physique, la détresse et la dépendance aux drogues fortes.

Autrement dit, une peine d’amour nous transforme temporairement en junky cherchant désespérément sa dose. Cette condition expliquerait pourquoi on peut devenir déprimé, violent, suicidaire ou simplement obsédé par notre ex. Et ces comportements étranges et irrationnels qu’on tend à avoir envers cette personne, comme de la harceler, de l’espionner ou d’aller s’humilier à chialer sous son balcon…

Mais bonne nouvelle, cette étude prouve aussi ce que maman nous a toujours dit (mais qu’on n’a pas toujours cru) : le temps arrange tout. En effet, plus l’eau coule sous les ponts, moins le cerveau réagirait à ce lien d’attachement qui nous retient dans le passé, et qui nous tue.

Ouf!

On finit donc par ressusciter, mais probable que ce ne sera pas au printemps…

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