Immigration et recherche d’emploi: mission possible!

Même diplômés et expérimentés, plusieurs immigrants peinent à se faire engager dans leur domaine. Le secret pour y arriver? Ajuster sa recherche aux méthodes du Québec. Voici cinq conseils pour vous mettre en valeur auprès des employeurs d’ici.

Selon le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles, le Québec a accueilli quelque 49 000 immigrants en 2009, dont 65 % avaient en poche au moins l’équivalent d’un diplôme collégial. Malheureusement, cela ne suffit pas toujours pour décrocher un emploi. En 2009, 22 % des nouveaux arrivants établis ici depuis cinq ans ou moins étaient au chômage. Au même moment, c’était le cas d’à peine 8 % des Québécois «de souche»…

Des spécialistes en emploi qui travaillent auprès d’une clientèle immigrante indiquent toutefois qu’en effectuant quelques démarches, vous pourriez améliorer vos chances de trouver un poste à la hauteur de vos compétences. Il n’y a pas de recette magique, donc vous devrez y mettre des efforts.

Voici leurs meilleurs conseils :

Organisez votre vie personnelle

«Avant de chercher un travail, assurez-vous d’avoir une adresse postale stable, une garderie ou une école où envoyer vos enfants et tous les papiers dont vous avez besoin, de la carte d’assurance maladie à un permis de conduire. Vous aurez alors l’esprit libre pour la recherche d’emploi», dit Elizabeth Giacchi, conseillère en emploi à l’Alliance pour l’accueil et l’intégration des immigrants (ALAC), à Montréal.

Assistez à une formation sur les techniques de recherche d’emploi

Ces ateliers vous en apprendront beaucoup sur le Québec. Par exemple, «que les curriculum vitæ [CV] ici ont rarement plus de deux pages et qu’ils mettent l’accent sur les réalisations plutôt que sur les diplômes; que 85 % des postes disponibles ne sont pas affichés et que les Québécois apprécient une poignée de main ferme et n’aiment pas les retardataires», énumère Raja Habbal, directrice générale du Comité d’adaptation de la main-d’œuvre personnes immigrantes (CAMO-PI), un organisme spécialisé dans l’intégration au marché du travail des immigrants.

Ces ateliers vous aideront aussi à adapter votre CV afin qu’il colle mieux aux demandes des employeurs. «J’ai obtenu un baccalauréat en génie civil en Algérie», dit Lofti Rabehi, établi au Canada depuis novembre 2009. «Mais je maîtrise aussi la comptabilité, parce que j’ai longtemps été travailleur autonome.» Suivant les conseils reçus lors de son atelier de recherche d’emploi, Lofti n’a pas mentionné ses compétences en comptabilité dans son CV. «Ce n’était pas pertinent pour les postes qui m’intéressaient, dit-il, et ça aurait mêlé les employeurs.»

Et cela a marché! En ciblant bien les compétences qu’il voulait vendre dans son CV, Lofti a décroché un poste : depuis mars 2010, il travaille comme estimateur pour un important entrepreneur de Montréal.

«Ces ateliers sont aussi une occasion de bâtir votre réseau et d’être soutenu dans votre recherche d’emploi», dit Fadia Younan, coordinatrice du Service emploi du Centre d’accueil et de référence sociale et économique pour immigrants (CARI) St-Laurent. Même les chercheurs d’emploi nés ici ont intérêt à profiter de ce genre d’atelier pour stimuler leurs ­démarches.

Des subventions pour payer votre salaire!

Pour convaincre les employeurs de vous embaucher, invitez-les à se renseigner sur le Programme d’aide à l’intégration des immigrants et des minorités visibles en emploi (PRIIME) et le Projet IPOP pour l’intégration en emploi de personnes formées à l’étranger référées par un ordre professionnel. Ces programmes gérés par Emploi-Québec paient partiellement pendant au moins 30 semaines le salaire d’un immigrant. Cela encourage les employeurs à vous embaucher… et à vous garder une fois la subvention épuisée!

Pour plus d’infos, communiquez avec votre centre local d’emploi (CLE).

Renseignez-vous sur le secteur qui vous attire

Pour vous tailler une place dans une industrie, vous devez apprivoiser les façons de faire de ce secteur ici, au Québec. Par exemple, un mécanicien de machines fixes doit notamment connaître les principales entreprises du secteur, les équipements qu’elles utilisent et les compétences qu’elles recherchent. Idem pour tous les chercheurs d’emploi, que vous soyez informaticien, menuisier, enseignant, infirmier ou cuisinier.

Les ateliers de recherche d’emploi sont de bons endroits pour trouver ce genre de renseignements. Plusieurs autres organismes sont utiles, dont les comités sectoriels de main-d’œuvre, Emploi-Québec et la Banque d’information industrielle du Centre de recherche industrielle du Québec, qui liste les entreprises de la province et les produits ou services qu’elles vendent. Les associations professionnelles sont d’autres incontournables pour connaître les règles entourant la pratique de votre profession au Québec (voir l’encadré Des infos en quelques clics pour les coordonnées).

«Une autre bonne manière d’obtenir de l’infor­mation est de décrocher une courte entrevue d’information auprès d’une entreprise», dit Fadia Younan. Demandez à parler à la personne qui dirige le service où vous aimeriez travailler ou au responsable des ressources humaines. Ibrahim Abou-Haidar, un Canadien d’origine libanaise arrivé au pays en 2009, a tenté cette démarche. «Plusieurs gestionnaires n’ont pas hésité à prendre un café pour parler avec moi avant leur journée de travail, dit Ibrahim, conseiller en crédit commercial à la RBC depuis février 2010. Pour obtenir un rendez-vous, je disais que j’avais de l’expérience dans la gestion de risque et que je voulais en savoir plus sur leurs procédures et politiques à ce sujet. Cela m’a été très utile pour comprendre le marché d’ici.»

«Pour décrocher une entrevue d’information, ne vous présentez pas comme un chercheur d’emploi; dites plutôt que vous voulez des informations, suggère El Hadji Diaw, conseiller en emploi et en placement au CARI St-Laurent. Soyez bref, mettez l’accent sur votre expérience et faites une demande précise. Par exemple, si vous travaillez en construction, dites que vous voulez en savoir plus sur les permis obligatoires de l’industrie et les moyens de les obtenir.»

Connectez-vous sur la vie québécoise

Connaître les équipes de hockey, les téléséries et les ministres du Québec facilite les conversations et les rencontres, ce qui vous aide à créer un réseau. «Les nouvelles, ça concerne tout le monde : être au courant montre que j’ai envie de m’intégrer à la société québécoise», juge Ibrahim Abou-Haidar.

Les loisirs sont une autre bonne façon de rencontrer des Québécois et de se brancher sur la société. Joignez-vous, par exemple, à une association de marche, d’escalade, un club de bridge ou de lecture, suivant vos préférences. N’oubliez jamais que la majorité des offres ne sont pas affichées et que la plupart des chercheurs d’emploi décrochent un poste grâce à leur réseau de connaissances. Qui sait? Vous rencontrerez peut-être à votre atelier de couture quelqu’un qui a entendu parler d’un poste pouvant vous intéresser.

Allez chercher une expérience canadienne

Même si vous avez travaillé dix ans dans votre domaine dans votre pays d’origine, un employeur d’ici ne sait pas si votre expérience est pertinente au Québec. Pour obtenir cette première expérience canadienne, vous pourriez accepter un poste en dessous de vos compétences. «Restez toutefois le plus près possible de votre domaine pour que cet emploi vous aide à apprivoiser votre secteur et à créer un réseau professionnel», conseille El Hadji Diaw. Par exemple, un ingénieur peut accepter un poste de technicien en ingénierie et une adjointe administrative, un emploi de réceptionniste. «Restez à ce poste subalterne le moins longtemps possible et continuez parallèlement vos recherches d’emploi, précise-t-il. Votre objectif est de démontrer à un employeur que vous connaissez le marché du travail québécois, pas de sous-utiliser vos compétences pendant des années!»

«Faire du bénévolat, selon ses disponibilités et, idéalement, dans un secteur lié à son métier, est une autre bonne solution», dit Elizabeth Giacchi. Par exemple, si vous êtes enseignant, donnez des cours en lien avec vos connaissances (langues, math, comptabilité, etc.) dans un organisme communautaire. Certes, ce sera plus difficile d’être bénévole dans votre domaine si vous êtes technicien en génie alimentaire. Cherchez alors une activité bénévole qui vous plaît, car qu’importe le milieu, cette expérience développera votre réseau.