Métier : épithésiste

Louise Desmeules
Louise Desmeules, épithésiste à l'Hôtel-Dieu de Québec
Photo : Guillaume D. Cyr

Artiste dans l’âme, elle confectionne des parties de visage pour des patients défigurés ou handicapés.

Je fabrique des épithèses – des prothèses en silicone qui ressemblent à la peau. Je fais des nez, des yeux et des oreilles, pour des patients auxquels il manque une partie de visage à cause d’une absence congénitale ou qui l’ont perdue à la suite d’un cancer ou d’un accident.

Je commence par sculpter la partie du visage dans de la cire, en présence du patient qui me sert de modèle. Quand la forme et tous les détails sont au point, j’en fais un moule en plâtre dans lequel je coule de la silicone. Le tout est cuit au four pendant deux heures et demie.

Je colore la silicone – qui est translucide – avec des poudres, des crèmes et des fibres. Je fais plusieurs couches, avec différentes couleurs, pour reproduire les ombrages, les cernes, la texture de la peau, les veinules sur l’œil, etc. Le plus difficile, c’est les yeux. Je dois réussir à transmettre l’âme qui anime le regard.

Je suis la seule épithésiste au Québec. J’ai toujours eu un tempérament artistique, mais je voulais un métier sûr. Comme j’ai aussi un petit côté mère Teresa, j’ai d’abord choisi les soins infirmiers. J’ai travaillé trois ans comme infirmière avant de devenir assistante dentaire en oncologie, essentiellement pour avoir un horaire de jour. Ça a changé ma vie!

Un médecin y faisait à l’occasion des épithèses et ça me fascinait. Pendant 10 ans, je lui ai signifié mon intérêt, puis, en 2000, il m’a passé le flambeau. Il continue d’assumer les aspects médicaux – comme la chirurgie pour poser les implants dans lesquels l’épithèse sera fixée – et je crée les épithèses.

La confection comme telle prend trois jours. Mais, pour le patient, le processus dure entre cinq et six mois.

Le patient doit enlever l’épithèse tous les soirs. Au bout de trois ans environ, il lui faut la renouveler. S’il est satisfait, je lui en refais une avec le moule original. S’il y a des modifications à apporter, je fais une nouvelle sculpture.

Les patients qui ont perdu une partie de leur visage sont très troublés quand ils nous arrivent. Avec l’épithèse, ils peuvent reprendre le cours de leur vie. Ils sont extrêmement reconnaissants et, pour moi, c’est très valorisant.

Il y a cinq ans, j’ai été touchée par un cancer et j’ai subi l’ablation d’un sein. Quand j’ai eu ma prothèse, j’ai ressenti un immense bonheur à retrouver une partie de moi. J’ai vraiment compris ce que vivent mes patients.

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