Santé mentale : une semaine mouvementée

Réflexions en cette Semaine nationale de la santé mentale 2012, qui tombe en plein Printemps érable.

Du 7 au 13 mai, c’est la Semaine nationale de la santé mentale, organisée l’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM), un organisme communautaire établi partout au pays.

L’Association en profite pour rappeler que 20 % des Canadiens seront atteints d’une maladie mentale au cours de leur vie; l’autre 80 % a donc de fortes chances de compter une victime parmi ses proches. On parle principalement de gens souffrant de dépression et de troubles anxieux, mais aussi de schizophrénie, de troubles alimentaires, de troubles de la personnalité, de démence et de trouble déficitaire de l’attention.

En plus de nuire gravement à la qualité de vie des individus touchés, le problème inquiète de nombreuses instances : gouvernements, employeurs et compagnies d’assurances, entre autres. Il y a de quoi : chaque jour, 500 000 personnes s’absentent du travail pour des raisons de santé mentale. Chaque année, employeurs et assureurs dépensent 8,5 milliards de dollars en prestations d’invalidité pour des employés touchés. Il s’agit même de la principale cause d’invalidité dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la santé.

Les milieux de travail interpellés

La source exacte du mal demeure mystérieuse. Ce serait un mélange de prédispositions génétiques et de facteurs environnementaux, comme une situation familiale difficile, la pauvreté ou le stress en milieu de travail.

Mais comme la population active s’en ressent, les employeurs sont de plus en plus sollicités pour atténuer les facteurs de risque sur lesquels ils peuvent agir. En témoignent les normes Entreprise en santé et Conciliation travail-famille récemment implantées au Québec; les nombreuses recherches universitaires qui tentent de cerner ce qui mine le moral des troupes dans les organisations; et les trousses pour aider les gestionnaires à améliorer le climat de travail.

J’ai moi-même créé la chronique Affaires intérieures dans le Magazine Jobboom pour aborder ces questions. Ce qui revient souvent dans le discours des experts que j’ai interviewés et les ouvrages que j’ai consultés, c’est à quel point le travail et ses exigences prennent de la place dans nos têtes.

Le mieux-être, une utopie?

Tout le monde veut gagner sa vie, mais souvent, l’état d’esprit nécessaire pour y parvenir – soif de performance, perfectionnisme, compétition – s’installe à demeure, si bien qu’on ne décroche plus. Mes sources blâment en général l’obsession du profit des organisations (toujours faire plus avec moins) et l’invasion de la technologie (qui pousse à rester disponible partout et tout le temps), avant de souhaiter sans trop y croire que la société change pour devenir plus humaine.

Mais, songeant aux manifestants étudiants dont la détermination ne semble pas faiblir après 13 semaines de conflit, je me demande s’ils se contenteront de vœux pieux, une fois sur le marché du travail. Le vrai changement pourrait venir avec la prochaine génération de travailleurs…

Manifestations

J’en étais à ces réflexions quand un groupe de manifestants est entré subitement dans l’immeuble où je travaille. Ils en avaient contre les gouvernements et les corporations, qu’ils accusent de précariser les citoyens. Les policiers présents n’ont pas bronché, mais compte tenu de l’agitation des dernières semaines, j’avoue avoir ressenti un soupçon d’inquiétude. Surtout qu’en matinée, des bombes fumigènes ont entraîné l’évacuation du réseau de métro au complet.

Ironiquement, en 2012, l’ACSM a placé la Semaine de la santé mentale sous le thème de la sécurité. «À l’intérieur comme à l’extérieur, se sentir bien et en sécurité, c’est important», dit le slogan trouvé pour l’occasion.

On peut difficilement être contre cela. Mais c’est à se demander d’où viendra cette sécurité.