Photos-souvenirs : une usine de Coca-Cola à Montréal

Jobboom lance ce mois-ci la rubrique Photos-souvenirs, qui vous plongera dans le monde du travail d’antan à travers des clichés d’archives. Pour lancer le bal, voici des images de 1941 prises dans une usine de Coca-Cola à la fine pointe de la technologie de son époque. Bonne visite!

Photo : Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Photo : Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Une grande usine pour un grand marché

En 1929, la Coca-Cola Company of Canada Limited entreprend la construction d’une usine d’embouteillage au 200, rue de Bellechasse, à l’angle de l’avenue de Gaspé à Montréal. L’emplacement est idéal : tout près du chemin de fer et des routes principales, à une époque où le réseau routier s’améliore. Le quartier est alors en plein développement; des travailleurs s’y installent avec leur famille.

La nouvelle installation servira à produire le sirop envoyé par barils aux usines des Maritimes et de l’est de l’Ontario, en plus d’embouteiller le produit fini pour les consommateurs de Montréal et des environs. Au départ, 576 bouteilles à la minute sortent des six chaînes de montage.

À l’époque, le Canada est particulièrement friand de la «liqueur» noire. En 1921, il se vend plus de Coca-Cola à Winnipeg qu’à Atlanta, où a pourtant été inventée la boisson. En 1930, Montréal consomme autant de bouteilles que La Nouvelle-Orléans.

Photo : Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Photo : Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec

De l’équipement à la fine pointe de la technologie

À l’inauguration de l’usine, en août 1931, les Montréalais sont conviés à une visite des installations «ensoleillées», qui, selon Coca-Cola, comptent «parmi les plus modernes sur le continent». Ils sont invités à «inspecter» les locaux.

Dans ses publicités montréalaises, Coca-Cola assure que l’usine est «impeccable». «Un équipement moderne purifie l’eau et protège la saveur du Coca-Cola. Une machinerie automatique stérilise, remplit et scelle chaque bouteille sans même qu’une main humaine y touche.»

À voir cet ouvrier travailler, il semble que les opérations comportent tout de même un minimum d’intervention humaine, du moins pour ce qui est des barils de sirop.

Photo : Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Photo : Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Des tests pour un Coca-Cola «pur»

Selon une publicité de 1935 dans The Montreal Gazette, «22 tests en laboratoire sont réalisés par un chimiste diplômé pour s’assurer de la pureté et de l’uniformité du Coca-Cola dans la manufacture». C’est du sérieux!

Outre le laboratoire présenté sur cette photo, l’usine comprend des bureaux administratifs, une salle de filtration d’eau, une salle pour la production du sirop, une salle de carbonatation, un espace pour l’embouteillage, un entrepôt, un atelier de tonnellerie et un studio pour l’affichage.

Une caisse de six bouteilles de Coca-Cola se vend 27 sous cette année-là.

Photo : Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Photo : Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Syndicat, grève et déménagement

On ignore le nombre exact d’employés de cette usine, mais on sait que plus de 550 étaient présents lors d’un second vote tenu pour l’obtention d’une accréditation syndicale au début des années 1950.

Cette démarche n’aura d’ailleurs pas été de tout repos : après un premier vote favorable, l’employeur a poursuivi le syndicat (et la Commission du travail ayant accrédité le syndicat), remettant en question la validité du vote.

Une grève est déclenchée en 1965 alors que les travailleurs empochent en moyenne 75 $ par semaine. Ces derniers demandent une augmentation de salaire de 45 sous l’heure, tandis que la partie patronale offre 18 sous sur deux ans. La question du respect de l’ancienneté est également un point de discorde.

La grève, menée conjointement avec les employés des deux autres usines montréalaises de Coca-Cola et de celle de Québec, dure sept mois. Il s’agit du plus long conflit de travail de l’année pour toute la ville, selon un palmarès de la Montreal Gazette publié le 3 janvier 1967.

L’usine fermera en 1973, et les employés seront transférés dans d’autres installations plus modernes ailleurs dans la métropole. La Ville de Montréal acquiert ensuite le bâtiment. Aujourd’hui, l’édifice de la rue de Bellechasse est occupé par le Service de sécurité incendie.

Sources : Archives – The Montreal Gazette, Coca-Cola, Héritage Montréal, Patrimoine urbain – Ville de Montréal

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