L’anglais en assurance, un must

Avec des milliers de postes à offrir au cours des prochaines années, pas de doute : l’industrie de l’assurance est en croissance au Québec. Mais attention, pour obtenir l’un de ces emplois, ce n’est pas tout d’avoir un diplôme dans le domaine. Le bilinguisme est de plus en plus exigé par les employeurs.

Les plus récentes données de la Chambre de la sécurité financière prévoient la création de 10 000 postes au cours des sept à huit prochaines années. De son côté, la Coalition pour la promotion des professions en assurance de dommages estime que 2 000 postes seront à pourvoir en 2012 dans son secteur.

Cette forte demande est palpable dans les collèges qui offrent le programme Conseil en assurances et en services financiers. Déjà les diplômés ne suffisent pas. «Bon an mal an, la presque totalité de nos 60 diplômés sont engagés par l’entreprise qui les a accueillis en stages. Ce qui n’empêche pas notre service de placement de recevoir des offres d’emploi, soit 68 pour l’année 2010-2011», constate Johanne Giguère, coordonnatrice du Département du conseil en assurances et en services financiers, au Cégep de Sainte-Foy, à Québec.

Malgré ce déséquilibre entre l’offre et la demande, les entreprises ne diminuent pas leurs exigences et s’attendent à ce que les nouveaux venus aient une bonne maîtrise de l’anglais. Car depuis une vingtaine d’années, les assureurs québécois ont multiplié les fusions et les acquisitions de compagnies hors Québec, en plus de développer la clientèle anglophone.

«Au fil du temps, nous avons fait l’acquisition de compagnies d’assurance à Toronto, Vancouver et même à Waco, aux États-Unis», illustre Jérôme Dubé, coordonnateur des ressources humaines pour la région montréalaise de l’Industrielle Alliance, Assurance et services financiers. «Nous avons des bureaux dans tous les grands centres canadiens. La compagnie possède maintenant 60 % de son portefeuille d’affaires à l’extérieur du Québec. Certains employés québécois travaillent à Vancouver, Toronto, Calgary, Moncton et Scottsdale, en Arizona. D’autres, installés à Québec ou à Montréal, ont pour tâche de servir les clients anglophones qui résident ailleurs au Canada.» D’où l’importance de maîtriser l’anglais.

Un marché en croissance

Le portrait de l’industrie s’est en effet transformé depuis une douzaine d’années. À titre d’exemple, en 2000, la clientèle de Groupe Desjardins, assurances générales était composée uniquement de francophones. «Cinq ans plus tard, 35 % de notre chiffre d’affaires provenait de la clientèle anglophone, alors qu’en 2012, on prévoit que ce sera 50 %», précise Sylvie Paquette, présidente et chef de l’exploitation au Groupe Desjardins. Un exemple qui illustre la progression fulgurante du marché anglophone pour cette entreprise qui a son siège social à Lévis, mais qui est présente tant au Québec qu’en Ontario et en Alberta.

Du côté de La Capitale Groupe financier, à Québec – qui regroupe les secteurs de l’assurance de personnes et de l’assurance de dommages –, les employés québécois ne s’occupent pas directement des clients de l’extérieur de la province. «Par contre, ils doivent entrer en communication avec les employés unilingues anglophones des bureaux de l’Ontario, de l’Alberta et de la Colombie-Britannique, expose Geneviève Drouin, directrice principale des ressources humaines. De plus, ils ont à servir les clients anglophones d’ici.»

Par ailleurs, plusieurs compagnies telles que Great-West, Financière Manuvie, Financière Sun Life, Allstate et RBC Assurances n’ont pas leur siège social au Québec. Anne-Marie Deschênes, vice-présidente de l’Association de la relève en assurance du Québec, signale que l’anglais est présent dans les diverses formes de communications (courriels, communiqués, réunions téléphoniques) dans les filiales québécoises de ces compagnies.

L’anglais : un must

«Tous ceux qui travaillent directement avec la clientèle, comme les agents en assurance de dommages et les agents de bureau, doivent bien maîtriser l’anglais, précise Geneviève Drouin. Nous n’exigeons pas un bilinguisme parfait, mais un anglais de niveau intermédiaire avancé.»

Du côté de l’Industrielle Alliance, Assurance et services financiers, où plus de 225 emplois ont été créés en 2011, la langue de Shakespeare est essentielle pour les agents de service à la clientèle, les gestionnaires de cas (invalidité), les analystes en réclamations, les tarificateurs, les développeurs en technologies de l’information, ainsi que divers postes en gestion. «Pour certains postes, on vérifie le niveau d’anglais avant même la première entrevue», note Jérôme Dubé.

À Montréal, c’est requis pour tous les postes opérationnels, fait valoir Sylvie Paquette. C’est aussi essentiel pour les professionnels comme les actuaires et pour les spécialistes du marketing dont le rôle déborde les frontières de la province. Étant donné que la clientèle anglophone du Groupe Desjardins, assurances générales augmente sans cesse, tout comme chez les autres assureurs, l’anglais sera plus que jamais un must pour les aspirants employés.

Former les employés

Pour les assureurs, l’idéal serait de n’engager que du personnel bilingue. La mission est possible à Montréal, mais plus ardue dans les régions de Québec et de Chaudière-Appalaches où se trouvent 11 sièges sociaux de compagnies d’assurance. «À Québec, nous recrutons à peine un candidat sur quatre qui maîtrise bien l’anglais, signale Sylvie Paquette. En 2011, parmi l’ensemble des 285 emplois créés dans la province, la moitié a été pourvue par des employés bilingues ou de niveau intermédiaire avancé.»

Pour rester dans la course, les assureurs québécois cherchent par tous les moyens à améliorer le bilinguisme de leurs troupes. Cours d’anglais individuels ou de groupe, jumelage entre francophones et anglophones, immersion dans une filiale située à l’extérieur du Québec : diverses formules ont la cote.

Mais pour décoder tout le langage technique propre au secteur des assurances, un pas de plus a été franchi, mentionne Gilles Juneau, directeur général du Centre de développement en assurances et services financiers. «Les compagnies installées à Québec et à Lévis ont développé un programme de formation en ligne, explique-t-il. Il s’agit de blocs de 15 heures sur des thèmes très pointus comme l’invalidité et les prestations d’assurance vie et toute la terminologie qui s’y rattache.»

Mieux préparer la relève

Conscient du problème auquel sont confrontées les entreprises, le Cégep de Sainte-Foy met aussi son grain de sel pour améliorer les compétences linguistiques de la relève.

«Les élèves peuvent faire leur premier stage rémunéré en entreprise en anglais, soit à Vancouver, Toronto ou Halifax, fait remarquer Johanne Giguère. Nous travaillons en collaboration avec les entreprises qui ont des bureaux à l’extérieur de la province. Ils peuvent également suivre leur dernière session d’études au Humber College, à Toronto. Ils ont aussi la possibilité de participer à des ateliers de conversation anglaise au Cégep, en dehors des heures de cours.»

Au moyen de sa Fondation Industrielle Alliance pour l’apprentissage d’une langue seconde, la compagnie du même nom, en partenariat avec des cégeps de Québec et prochainement de Montréal, finance des séjours d’immersion et des sessions d’études dans un milieu de langue étrangère. Pour l’année 2011-2012, cette fondation compte verser 30 bourses d’études, pour une valeur totale de 60 000 $.

De son côté, pour la première fois, La Capitale Groupe financier va proposer cette année des stages d’été à Mississauga, en banlieue de Toronto, à deux élèves du Cégep de Sainte-Foy. Geneviève Drouin prédit que «si ces derniers apprécient leur expérience, il y a de fortes chances qu’ils choisissent la compagnie pour leurs stages, puis qu’ils soient engagés une fois leur formation terminée. De plus, ils auront l’avantage d’avoir déjà une expérience de travail en anglais au sein de la compagnie.»

En clair, les assureurs assurent leur avenir. Enseigner l’anglais à leurs employés, c’est bien. Préparer la relève aux nouvelles réalités du marché, c’est encore mieux : une vraie police d’assurance pour avoir du personnel qualifié!

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