Coronavirus et télétravail :
l’occasion de faire le point
sur une pratique en devenir?

Le contexte actuel de crise sanitaire mondiale nous incite à modifier, au moins temporairement, notre manière de travailler et consécutivement notre rapport à ce dernier. Les gouvernements prônent des pratiques de travail « à distance » afin de limiter la propagation de la pandémie de Coronavirus : voilà donc le télétravail qui fait son retour.  À ce titre il est même question pour certains de « révolution » des usages (Les échos, 2020), Radio Canada s’interrogeant même si le Canada « pourrait fonctionner en mode télétravail » (2020).

Pourtant, une telle pratique n’est pas nouvelle puisqu’elle date du milieu des années 1990.  Après une belle envolée, son utilisation est demeurée largement minoritaire (Le monde, 2020). À cet égard, elle semble être encore assez marginale, le Québec comptant actuellement de 5 % à 8 % de télétravailleurs, ce qui en ferait tout de même l’un des taux les plus élevés dans le monde (Parisella, 2020).  À cet égard, Statistique Canada (2008) précise que ce sont surtout et principalement les travailleurs autonomes qui en font plus largement usage (60%).

Aujourd’hui, l’actualité semble vouloir accélérer cette pratique.  En France par exemple, le gouvernement annonce vouloir inciter au télétravail pour tous.  Ainsi que le souligne Philippe Escande (Le monde, 2020) : « en théorie, le télétravail apporte flexibilité et liberté au salarié, il est plus écologique, en abolissant les déplacements, et colle au désir d’autonomie de générations converties aux réseaux sociaux de masse. On peut donc imaginer une vraie rupture dans la transformation du travail ».

De fait, le développement du télétravail induit un changement de représentation du travail. Ainsi que le souligne la sociologue Alexandra Bidet (2016),  la conception du travail a évolué : « Avant, travailler c’était être présent de telle heure à telle heure sur des lieux dédiés. À l’opposé, il y a l’idée que peu importe le temps de présence, seul compte le résultat. Ça peut être une chance pour ceux qui préfèrent travailler de chez eux. Mais la question de l’expérience vécue du travail demeure la même : comment les employés vont-ils considérer qu’ils produisent effectivement quelque chose ? »

Ainsi, certains « effets pervers » semblent s’associer à une telle pratique.
En plus d’une perte de repères et de sens, on pourrait penser à une forme d’isolement induisant une distanciation des relations avec le risque d’une désocialisation des rapports humains, mais aussi le risque d’une confusion accrue des limites entre le travail et la vie privée.

Au-delà des avantages et des inconvénients qui existent à recourir au télétravail et selon la revue systématique conduite par Bouchard, Saint-Jacques et Dussault (2018) sur l’effet de cette dernière chez les gestionnaires, il existe un niveau de preuve modéré permettant d’affirmer que le télétravail améliore la satisfaction au travail. De plus, des niveaux de preuves faibles permettent d’affirmer que le télétravail améliore la performance au travail et le sentiment d’autonomie.

Dans ce contexte de crainte et qu’inquiétude face au Coronavirus, la question qui demeure n’est-elle finalement pas de savoir si nous souhaiterons retourner sagement au bureau quand l’orage pandémique sera derrière nous ?

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Frédéric Piot

Après des études et une première partie de carrière passée en administration (gestionnaire et entrepreneur), Frédéric Piot est devenu conseiller d’orientation. Il exerce son métier dans le cadre d’une pratique privée à Montréal et en ligne (orientation-quebec.com), s’adressant à une clientèle d’étudiants, d’adultes mais aussi pour le compte de PAE et de tiers-payeurs (CNESST, SAAQ). Parallèlement, il a complété un PhD. en Éducation (UQAM, 2022) et dont le sujet porte sur l’évaluation d’un protocole d’orientation en groupe basé sur l’ACT et destiné à des individus en situation d’impasse professionnelle. Enfin, il est formateur ACT en milieu de travail et chargé de cours au programme de maîtrise en counseling de carrière à l'UQAM.

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