Boum d’emplois dans les ressources naturelles

Oui, l’économie du savoir continue de se développer au Québec. Mais le secteur des ressources naturelles tourne également à plein régime. Et les diplômés manquent à l’appel.

Les investissements miniers atteignent des sommets dans plusieurs régions du Québec, ce qui influe sur les besoins de main-d’œuvre.

Le Cégep de Sept-Îles est bien au fait de l’essor du secteur minier sur la Côte-Nord. Pour cette raison, un nouveau programme, Technologie minérale, y est maintenant offert. Il faudra toutefois attendre 2014 avant que les premiers diplômés accèdent au marché du travail, indique Caroline Michaud, conseillère en information scolaire et communication. Avec l’expansion du marché du fer et la présence d’entreprises comme ArcelorMittal, le Cégep prévoit que ces futurs diplômés profiteront d’un taux de placement de 100 % pour les 10 années à venir.

En 2012, les employeurs de ce secteur ont donc dû se contenter des 13 diplômés du Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue et des 26 diplômés du Cégep de Thetford, les deux seuls autres établissements à offrir ce programme proposant trois voies de sortie (géologie, exploitation et minéralurgie). «Nous avons reçu autant d’offres, sinon plus, que nous avons de diplômés», indique Robert Rousseau, directeur des études au Cégep de Thetford. Et l’établissement prévoit que les besoins des entreprises iront en croissant pour les prochaines années. C’est pourquoi, à l’automne 2012, ce programme a accueilli 75 nouveaux étudiants. Une première en 15 ans. «Au-delà du Plan Nord, il y a plusieurs projets dans le domaine de la géologie. Ces diplômés peuvent travailler dans le milieu pétrolier et gazier, en hydrogéologie [gestion des eaux souterraines], dans les carrières et en géo-environnement où tout un volet est destiné au maintien et à la réhabilitation de sites miniers.»

Du côté du Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, les 13 diplômés de Technologie minérale ont pu consulter 38 offres d’emploi de septembre 2011 à mai 2012. Mais ce chiffre ne témoigne pas de la situation réelle, selon Katerine Duhaime-Major, conseillère au placement et à l’alternance travail-études. En effet, plusieurs entreprises ne passent pas par le service de placement pour recruter et embauchent leurs stagiaires. «La majorité des emplois sont offerts aux finissants de façon plus informelle et ne sont donc pas comptabilisés, estime-t-elle. Certains employeurs nous ont tout de même sollicités afin de venir rencontrer ces étudiants et ceux d’autres programmes. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous organisons des salons carrières.»

Les employeurs prévoient aussi le coup. «Avec le boum minier que nous connaissons actuellement, de plus en plus d’entreprises nous demandent des statistiques sur nos inscriptions afin de faire de la planification stratégique de main-d’œuvre à moyen et à long terme», rapporte Katerine Duhaime-Major. Heureusement pour eux, les cohortes augmentent. «Les étudiants sont d’abord attirés par les salaires élevés», explique-t-elle. À titre d’exemple, les diplômés en technologie minérale, profil exploitation, gagnent en moyenne 1 025 $ par semaine, selon les données de l’enquête Relance du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, publiée en 2011.

Technologues en génie recherchés

L’effervescence du secteur minier influence aussi le domaine de la métallurgie, qui transforme le minerai extrait du sous-sol québécois. Le milieu a besoin de relève, si bien que les diplômés du programme Technologie du génie métallurgique ont l’embarras du choix. Les 14 finissants de l’option Procédés de transformation au Cégep de Chicoutimi se sont vu présenter 65 offres d’emploi en 2012. «Ce programme est en manque de diplômés», déplore Johnny Gauthier, responsable du Service de placement. En plus de n’attirer que très peu de filles, cette technique est encore méconnue, ajoute-t-il. «Il semble que le terme “génie” fasse peur. Les jeunes associent automatiquement cela aux mathématiques, à la physique, à la chimie, etc. C’est pourtant une technique autant théorique que manuelle.» Même son de cloche au Cégep de Thetford, où même les offres de stages restent sans réponse.

Le Cégep de Trois-Rivières a quant à lui reçu 152 offres d’emploi pour ces diplômés en 2011, indique Caroline Hamel, responsable du Service de placement. Cette année, 11 étudiants ont été diplômés dans l’une des trois voies : procédés de transformation, fabrication mécanosoudée ou contrôle de matériaux. Ces diplômés obtiennent généralement des postes à temps complet comme techniciens en métallurgie au sein d’entreprises de produits métalliques, de fonderies ou de laboratoires.

Effet boule de neige

La bonne santé du secteur des mines et de la métallurgie crée aussi une demande pour les diplômés de Technologie de maintenance industrielle et de Technologie de l’électronique industrielle, notamment. «À Sept-Îles, l’Aluminerie Alouette est le plus important employeur des techniciens en maintenance industrielle, indique Caroline Michaud, conseillère en information scolaire et communication au Cégep de Sept-Îles. Une troisième phase de développement est d’ailleurs prévue pour 2016.» Contrairement à d’autres entreprises, Alouette exige le DEC, ce qui laisse présager de belles ouvertures pour les diplômés en maintenance industrielle, ajoute-t-elle.

Autre joueur important : ArcelorMittal a fait parvenir 70 offres d’emploi à l’intention des techniciens en électronique industrielle du Cégep de Chicoutimi en 2012. Et ce n’est pas la seule entreprise, puisque l’établissement a reçu plus de 200 offres d’emploi pour ses 17 finissants. Dans la foulée du Plan Nord et du projet de la Romaine, les diplômés de Technologie de génie civil ont également eu la cote pour mettre en place diverses infrastructures. Au total, les 49 diplômés se sont partagé 180 offres d’emploi.

Au Cégep de Sept-Îles, ce sont les diplômés de Techniques de comptabilité et de gestion, Techniques de bureautique et Techniques de l’informatique qui profitent actuellement des retombées préliminaires du Plan Nord. Leur placement, qui a toujours été bon, est de 100 % cette année. «Plusieurs boîtes de prospection et d’ingénierie sont venues s’établir dans la région afin de tâter le terrain, explique Caroline Michaud. Nos finissants des secteurs administratif et informatique en ont beaucoup profité.»

Ressources à exploiter

Les techniques de la foresterie et du papier sont en mal d’étudiants : les établissements n’arrivent même pas à pourvoir les quelques emplois encore offerts dans ces secteurs. C’est le cas au Cégep de Sainte-Foy, qui a dû annuler son programme Technologie de la transformation des produits forestiers pour une cinquième année, faute d’inscriptions.

En décembre 2011, le Cégep de St-Félicien n’a diplômé qu’un seul étudiant dans ce programme. Douze propositions d’embauche lui étaient destinées. Et l’établissement ne comptait aucun finissant en 2012. «Les entreprises savent qu’on a de moins en moins de diplômés et nous envoient moins d’offres, explique Luc Lapointe, responsable du Service de placement. Les technologues sont pourtant recherchés et certaines entreprises doivent se résoudre à former leur propre main-d’œuvre.»

Le programme Technologie des pâtes et papiers, Procédés et valorisation ne sera pas offert en 2012-2013 au Cégep de Trois-Rivières, qui l’a suspendu pour une seconde année. Rappelons que cette école est la seule à donner cette formation. Les neuf offres d’emploi reçues de janvier à décembre 2011 sont donc demeurées sans preneur.

Autre exemple, au Cégep de Chicoutimi, les trois diplômés du programme Technologie forestière ont pu consulter une trentaine d’offres d’emploi. De 110 étudiants au début des années 2000, le département est passé à une dizaine en 2012. «Il est certain que tout ce qu’on a entendu sur les fermetures et les mises à pied dans les scieries a fait peur aux étudiants et à leur famille, estime Johnny Gauthier, responsable du placement. Cependant, les besoins de main-d’œuvre sont encore présents. Nous pourrions avoir une vingtaine de diplômés et ils travailleraient tous.» Du côté du Cégep de Sainte-Foy, on assiste toutefois à la situation contraire. En mai 2012, on y comptait 24 offres d’emploi pour 30 finissants. Au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, le nombre de diplômés est équivalent à celui des postes offerts.

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Dans ce dossier

• Sciences et technologies à l’avant-scène
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