Travailleur autonome et clients :
tout est négociable

Le client n’a pas toujours raison. Il a souvent tort, surtout à l’heure de négocier le boulot. Or, les débutants ne savent pas toujours comment s’y prendre. En fait, on peut marchander avec le client sur quatre plans : les attentes, le tarif, les frais et les modalités.

Les attentes

Une commande vague est rarement payante. Le client veut-il une cuisine qui servira aussi d’établi ou de salle à manger? Est-ce que ça presse? La commande défie-t-elle les lois de la physique ou la loi tout court?

Quand le client ne sait pas ce qu’il veut, fragmentez la commande. Avant de bâtir un pont, les ingénieurs font une étude économique, une étude de faisabilité, un plan et un devis. Et le client paie souvent à chaque étape.

Cas classique : monsieur la veut blanche et madame la veut verte. Ce genre de situation est fréquent dans les ministères ou les grandes entreprises, et vous devriez toujours exiger d’obtenir un seul vis-à-vis qui arbitrera les opinions contradictoires dans son camp.

Si le client ne se branche pas, faites-lui bien comprendre qu’il devra payer pour n’importe quoi s’il donne le mandat de faire n’importe quoi. En général, ça le secoue. S’il persiste à ne pas savoir ce qu’il veut, tenez-vous loin.

Le tarif

Un tarif élevé offusque rarement un client sérieux, surtout si votre réputation ou la qualité de vos échanges justifient ce prix. Mais soyez toujours prêt à argumenter. Les débutants sont tentés de demander le minimum. Cela démontre en général qu’ils ne sont pas sûrs de leur travail. Le prix doit être comparable au tarif ayant cours dans le milieu, ce qui ne vous interdit nullement d’en demander plus.

Certains clients connaissent très bien les tarifs en vigueur et refusent de payer plus. C’est de bonne guerre. Fixez-vous des normes : «Je veux bien travailler à ce prix, mais pas pour une commande inférieure à 1 000 $.» «C’est 170 $ l’heure, minimum deux heures», m’a dit le plombier quand ma tuyauterie a gelé un 1er janvier. J’ai trouvé l’idée très bonne.

Soyez inventif. Le client qui refuse de payer davantage que le tarif horaire en vigueur accepte parfois de verser un supplément forfaitaire ou de troquer un service contre un meilleur tarif. Par exemple, vous pouvez négocier à rabais la conception d’un logiciel de gestion de ses stations-service en échange d’un bon d’essence gratuite utilisable pendant un an.

Les frais

Si le client rechigne sur le prix, offrez-lui donc de payer les frais séparément. Votre menuisier n’agit pas autrement quand il vous fait payer le bois à part.

Soyez toujours prêt à argumenter.

Le client établira souvent un plafond de frais, ce qui exige que vous compreniez bien ses attentes. Ne négligez rien, en particulier les frais résultant de caprices particuliers. La compagnie Cent Dessins veut absolument que 1 200 aide-mémoire plastifiés soient imprimés chez le beau-frère du fondateur à Lac-Mégantic. Voilà des frais d’interurbains, de courrier et de déplacement additionnels!

Vaut-il mieux discuter des frais avant de fixer le prix? Il arrive que cela se fasse tout naturellement, car les frais découlent parfois des attentes du client. Certains préfèrent en parler de toute façon avant de discuter du prix, pour se ménager une porte de sortie : si le client refuse de rembourser les frais séparément, on peut alors négocier un tarif plus élevé.

Les modalités

Même un lucratif contrat de 100 000 $ plus les frais peut vous mettre en faillite si le client ne vous paie que deux mois après la livraison finale. Pour vous maintenir à flot, demandez toujours le paiement en plusieurs versements échelonnés. Dans le cas de dépenses importantes, négociez une avance séparée pour les frais. L’échéance de paiement des factures est aussi cruciale : un client qui règle sur six mois coûte cher.

Idéalement, le paiement final devrait avoir lieu «sur livraison» du travail. Évitez la formule «sur utilisation». À ces conditions, vous attendrez votre chèque longtemps si le client décide d’annuler son projet indépendamment de la valeur de votre travail. La formule médiane consiste à exiger le paiement «sur acceptation» : le client se réserve ainsi le privilège de ne pas accepter. Mais une fois qu’il a dit oui, il ne peut plus se dédire non plus.

Une autre modalité beaucoup plus délicate à négocier est le dédommagement, une clause utile s’il devait arriver que vos services ne soient plus requis parce que la situation ou la stratégie du client ont changé. Les débutants et les inconnus sont rarement en mesure d’établir ce genre d’accord, car le client craint les filous qui cherchent ainsi à être dédommagés sans effort.

À l’inverse, certains clients n’aiment pas reconnaître qu’ils ont changé d’avis, d’où l’intérêt de tout confirmer par écrit. Ne manquez pas de faire suivre vos discussions d’une lettre résumant l’ensemble des points négociés. Pour tout contrat important ou de longue durée, l’entente écrite est préférable à l’entente verbale. Mais souvenez-vous d’une chose : elle ne sera jamais meilleure que la bonne foi de votre vis-à-vis.

Journaliste à L’actualité et conférencier, Jean Benoît Nadeau est l’auteur du Guide du travailleur autonome publié aux Éditions Québec/Amérique.

Cinq règles
Les bons négociateurs suivent toujours les cinq règles suivantes :

1. Sachez qui est le patron. Votre vis-à-vis n’a peut-être pas la flexibilité voulue ni même l’autorisation de négocier.

2. Ne blessez jamais votre interlocuteur. Il obéit parfois à des exigences qu’il désapprouve. Il peut même devenir votre allié.

3. Soyez ferme. Demandez, même si vous pensez que ce sera non. Vous pourriez être surpris de la réponse.

4. Prenez toujours le temps de négocier. Même et surtout si ça presse.

5. Suivez votre instinct. Un client qui n’a pas l’air fiable ne l’est probablement pas. Le sixième sens détecte des choses que l’esprit refuse de voir. Si vous n’avez pas les moyens de fuir, négociez serré.

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