La route de l’emploi

Incroyable, mais vrai! Les embouteillages comportent certains avantages. Les nombreux chantiers routiers du Québec ont en effet besoin de travailleurs et représentent des moteurs d’emploi. À qui profitent les bouchons de circulation?

Tous les automobilistes le savent : les nombreux chantiers routiers au Québec ont transformé la conduite en un slalom entre les cônes orange! Entre la reconstruction de l’échangeur Charest–Robert-Bourassa, à Québec; l’entretien du pont Champlain et du complexe Turcot, à Montréal; l’achèvement de l’autoroute 30, en Montérégie, et la construction du Train de l’Est, dans Lanaudière, les détours sont nombreux.

Au total, le ministère des Transports du Québec (MTQ) avait prévu un budget de près de quatre milliards de dollars pour construire ou rénover plus de 1 600 infrastructures routières d’ici le printemps 2012. C’est sans compter les projets de la Société de transport de Montréal (STM), qui compte prolonger le métro jusqu’à Anjou en 2016, et jusqu’au secteur Bois-Franc dans l’arrondissement Saint-Laurent en 2019!

Si ces travaux impatientent les automobilistes, ils favorisent l’emploi. Seulement au MTQ, «ils entraîneront l’embauche de 970 personnes d’ici 2016, essentiellement des techniciens et des ingénieurs en génie civil», indique Caroline Larose, porte-parole du ministère. Et d’une manière générale, le MTQ estimait l’an dernier que les nombreux chantiers créeraient ou consolideraient 53 000 em- plois en 2011-2012.

Des retombées en arpentage… et en aménagement paysager

Les bureaux spécialisés en arpentage comptent parmi les entreprises qui profitent de la rénovation de nos infrastructures routières. Ils emploient notamment des arpenteurs-géomètres, qui ont en poche un baccalauréat en sciences géomatiques, et des titulaires du DEC Technologie de la géomatique (option Géodésie). Y travaillent aussi des arpenteurs-topographes, titulaires du diplôme d’études professionnelles (DEP) Arpentage et topographie. Ces personnes établissent notamment l’emplacement des futurs ouvrages et s’assurent qu’ils demeureront dans les limites établies.

Les chantiers routiers servent aussi les entreprises en environnement. «Dans tous les grands projets, il y a une évaluation environnementale avant la première pelletée de terre», explique François Labelle, directeur Gestion de projets majeurs – Section transport pour la firme de services professionnels et techniques d’Aecom. Cette tâche est confiée à différents professionnels, comme des techniciens en environnement ou des biologistes.

Les entreprises d’aménagement paysager représentent d’autres bénéficiaires des travaux. Une fois la machinerie disparue, des jardiniers amendent les sols et plantent des arbres sur les terrains adjacents aux nouvelles infrastructures. «Ces travaux sont confiés à des diplômés du DEP Horticulture et jardinerie ou du DEC Paysage et commercialisation en horticulture ornementale, option Espaces verts», dit Serge Bélanger, propriétaire de Maurice Bélanger Paysagiste. La PME a réalisé l’aménagement paysager aux abords de l’autoroute 20, dans le Bas-Saint-Laurent.

Ouvriers de la construction recherchés

Évidemment, la mise à niveau des routes et des ponts favorise aussi les différents travailleurs de la construction, dont les entrepreneurs généraux. Selon les entrevues menées par le Magazine Jobboom, reconstruire une route, un pont ou un viaduc emploie jusqu’à 15 types d’ouvriers différents, mais 4 semblent quasi incontournables : les charpentiers-menuisiers, les ferrailleurs, les opérateurs d’équipement lourd et les manœuvres.

La Commission de la construction du Québec n’exige pas de formation spécifique des manœuvres. Ces derniers suivent plutôt deux cours généraux : un sur la santé et la sécurité et un sur l’industrie de la construction. Sur les chantiers, ils assistent les ouvriers qualifiés et dirigent la circulation, entre autres.

Beaucoup d’ouvrage au complexe Turcot et au pont Champlain

La réfection du complexe Turcot – estimée à trois milliards de dollars – devrait s’étendre jusqu’en 2018 et fournir aussi son lot d’emplois. En 2011, une dizaine de chantiers ont contribué à allonger la durée de vie de cet enchevêtrement de trois autoroutes et de quatre échangeurs. À l’heure actuelle, sur l’un de ces chantiers, «environ 80 ouvriers – surtout des charpentiers-menuisiers et des manœuvres – rénovent deux bretelles du complexe», explique Sylvain Roy, responsable Relations du travail chez CRT Construction, la firme responsable des travaux.

Sur le pont Champlain, une centaine de travailleurs s’activent en attendant la construction du nouveau pont, annoncée en octobre 2011. Outre les corps de métiers mentionnés plus haut, on y trouve des monteurs d’acier de structure et des cimentiers-applicateurs. «Ces réfections requièrent aussi un ou deux capitaines de bateau pour transporter le matériel et les ouvriers jusqu’aux piliers au milieu du fleuve», précise Jean-Vincent Lacroix, chef, Communications, aux Ponts Jacques Cartier et Champlain Incorporée, une société d’État fédérale.

Enfin, au moins 150 chantiers pilotés par le MTQ en 2011-2012 concernent l’asphaltage des routes. «Ce genre de travaux requiert essentiellement des opérateurs de machinerie lourde et des manœuvres», explique Danny Castonguay, gérant de projet chez Construction & Pavage Portneuf.

D’autres locomotives d’emploi

L’expansion et la rénovation du réseau de transport en commun dans la grande région de Montréal participent aussi à la création d’emplois. Par exemple, le consortium Alstom-Bombardier livrera 468 nouvelles voitures de métro à la STM, de 2014 à 2018. À l’usine de Bombardier située à La Pocatière, dans le Bas-Saint-Laurent, «ce contrat va consolider à peu près 200 emplois d’assembleurs et entraînera l’embauche d’environ 45 employés de bureau permanents, dont des ingénieurs et des logisticiens», dit Sébastien Ross, directeur général de l’usine.

Rencontre avec Annie Raymond, signaleuse de chantier routier.

Les projets de prolongement du métro pourraient aussi stimuler l’emploi. Actuellement, personne ne peut garantir la venue de nouvelles stations de métro en 2016. Mais si les projets de la STM se concrétisent, plusieurs travailleurs seront demandés. «Construire le tunnel d’un métro nécessite environ 500 ouvriers qui proviennent d’à peu près tous les corps de métiers de la construction», indique François Labelle, d’Aecom. Cette firme, anciennement Tecsult, faisait partie du consortium qui a prolongé le métro à Laval. Parmi les travailleurs nécessaires, on trouve notamment les couvreurs, les tuyauteurs, les électriciens et les boutefeux.

Enfin, la construction du Train de l’Est a de son côté commencé à fournir des emplois. Le vaste chantier, supervisé par l’Agence métropolitaine de transport (AMT), ajoutera une ligne de train entre la ville de Mascouche et le centre-ville de Montréal. Cette nouvelle voie ferrée passera notamment sur le terre-plein de l’autoroute 640, dans Lanaudière. L’entrepreneur général Asphalte Jean-Louis Campeau construit un pont grâce auquel le train pourra passer au-dessus de l’autoroute et s’insérer dans le terre-plein. Ces travaux nécessitent actuellement une centaine de travailleurs, dont des ferrailleurs, des charpentiers-menuisiers, des manœuvres et des cimentiers-applicateurs.

Les voies ferrées seront posées par une firme dont on ne connaît pas encore le nom. «Il n’y a pas de formation pour faire ce métier», dit Léger Arsenault, vice-président de Réparations ferroviaires KLN, une PME de la région de Québec. «Nous embauchons des soudeurs et leur donnons une formation à l’interne.»

En plus de faire rouler l’économie, souhaitons que ces nombreux chantiers améliorent aussi nos déplacements!

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