La communication, essentielle en ingénierie

Groupe d'ingénieurs en réunion

Pour être ingénieur, il faut maîtriser des notions de mathématiques, de physique, de chimie… mais aussi de français et de communication! À l’oral comme à l’écrit, les ingénieurs doivent savoir s’exprimer clairement et adéquatement.

Le travail de l’ingénieur ne se résume pas qu’à concevoir et construire, rappelle le président de l’Ordre des ingénieurs du Québec, Stéphane Bilodeau. «Celui-ci doit aussi être en mesure d’interagir avec son employeur et les clients afin de les aider à prendre des décisions et à faire des choix éclairés. Pour y arriver, il lui faut notamment être capable de présenter un projet, d’expliquer ce qu’il fait, d’exposer clairement les enjeux et les défis potentiels, et même de participer aux débats sociaux», dit-il.

Pas étonnant, alors, que la communication s’inscrive dans les six compétences communes que doivent maîtriser les membres de l’ordre professionnel. Pour l’Ordre, communiquer efficacement est tout aussi fondamental pour l’ingénieur que d’assurer la qualité de ses activités et de ses travaux ou de gérer les risques à caractère technique.

En français, s’il vous plaît!

Savoir communiquer, c’est aussi maîtriser la langue. L’exercice de la profession d’ingénieur au Québec exige une connaissance appropriée du français. Cette condition s’applique d’ailleurs à l’ensemble des 45 ordres professionnels du Québec (architectes, avocats, psychologues, etc.), en vertu de la Charte de la langue française.

Dans les faits, l’élève qui a terminé au moins trois ans d’études dans un établissement secondaire ou postsecondaire francophone ou qui a réussi ses examens de français de quatrième ou cinquième secondaire répond automatiquement à cette exigence.

Néanmoins, cette obligation n’a rien d’une simple formalité, assure
Stéphane Bilodeau. «Une mauvaise connaissance de la langue française peut compliquer la tâche de l’ingénieur, qui doit régulièrement préparer des avis et rédiger des rapports. Cela est d’autant plus vrai qu’il n’y a pas toujours un réviseur en poste pour relire les documents, en particulier dans les organisations de plus petite taille.» L’ingénieur doit alors être autonome et réviser lui-même ses documents ou le contenu de ses présentations.

Christine Christophory a occupé durant 33 ans le poste de directrice du centre linguistique chez SNC-Lavalin. Les ingénieurs de la firme ont la chance de compter sur une équipe chargée de la révision et de la correction de documents, soit au besoin ou à la demande d’un supérieur.

La rédactrice et traductrice en a vu passer des vertes et des pas mûres au cours de sa carrière. Mais elle ne croit pas pour autant qu’une maîtrise parfaite de la langue devrait être exigée des ingénieurs, surtout lorsque d’autres professionnels comme les secrétaires, les rédacteurs et les traducteurs peuvent leur venir en aide. «C’est un travail d’équipe, dit-elle. L’important, c’est que les gens aient conscience de leurs faiblesses et qu’ils se réfèrent à quelqu’un de plus compétent qu’eux pour déceler ce qui peut facilement leur échapper.»

Communicateurs recherchés

Il reste que dans certaines entreprises, les compétences en français des ingénieurs sont évaluées dès le processus d’embauche. Bien que cette façon de faire ne soit pas généralisée, le président de l’Ordre est persuadé qu’une bonne connaissance de la langue peut permettre à un candidat de se démarquer du lot.

La Société de transport de Montréal (STM), qui emploie quelque 235 ingénieurs, n’évalue pas de façon systématique les aptitudes linguistiques des candidats lors d’un processus d’embauche, mais accorde tout de même une attention spéciale aux compétences en communication.

Si tout n’est pas encore parfait, Stéphane Bilodeau constate que la formation en communication et en français dans les établissements universitaires s’est beaucoup améliorée au fil des années.

«Comme nos ingénieurs ont un rôle de soutien au sein de l’entreprise, ils sont appelés à interagir avec plusieurs intervenants, que ce soit sur le plan des opérations ou des projets», indique Valérie Saint-Pierre, conseillère en dotation à la STM. L’ingénieur doit donc être en mesure de formuler sa pensée, de proposer des choses et de mener ses projets. «Si déjà, en entrevue, le candidat a de la difficulté à énoncer ses idées et à expliquer sa démarche, on peut facilement s’imaginer qu’il aura de la difficulté à communiquer.»

Dans de rares cas, il arrive néanmoins que la STM mesure spécifiquement la connaissance du français. «Ces évaluations sont requises pour les postes de coordonnateurs de projets du département qui réalise des études techniques», explique Anne-Marie Lombardi, chef de section aux ressources humaines. «Ces postes demandent une maîtrise du français supérieure, puisque les coordonnateurs ont à rédiger de volumineux rapports et le département ne compte pas d’employé chargé de la révision», ajoute Valérie Saint-Pierre, tout en précisant que ces postes ne représentent que deux pour cent de la main-d’œuvre en génie de la Société.

Outiller la relève

Si tout n’est pas encore parfait, Stéphane Bilodeau constate que la formation en communication et en français dans les établissements universitaires s’est beaucoup améliorée au fil des années. C’est notamment le cas à Polytechnique Montréal; lors de la révision des programmes de baccalauréat en 2004, une attention particulière a été accordée à l’aspect de la communication écrite et orale afin de pallier les lacunes en langue qui avaient été notées chez les étudiants.

«Depuis 2007, tous les nouveaux étudiants doivent passer une épreuve diagnostique à l’écrit et à l’oral, explique Sylvie Hertrich, coordonnatrice adjointe des cours de communication écrite et orale. Selon les résultats obtenus, ils sont redirigés de façon personnalisée vers des ateliers obligatoires.» Si certains ateliers visent des compétences langagières, la plupart s’attardent aux compétences communicationnelles.

Mais pour le président de l’Ordre, le développement de ces compétences ne devrait pas se limiter à la période passée sur les bancs de l’école. «À l’Ordre, nous espérons que nos membres aillent plus loin et qu’ils continuent à développer leurs connaissances à ce sujet», indique Stéphane Bilodeau.