Formation continue: et c’est pas fini!

Pour un ingénieur, l’apprentissage se poursuit bien après l’obtention du diplôme. Tant pour garder ses connaissances à jour que pour se conformer au règlement sur la formation continue de l’Ordre des ingénieurs du Québec. Comment tirer profit de cette obligation?

Ça y est! Après quatre ans de gestation, le nouveau règlement sur la formation continue de l’Ordre des ingénieurs du Québec est en vigueur depuis le 1er avril dernier. Désormais, tous les membres – y compris les ingénieurs juniors et les stagiaires – doivent suivre au moins 30 heures de formation continue tous les deux ans. L’Ordre se joint du coup aux rangs des autres ordres professionnels de la province qui imposent de la formation à leurs membres, comme le Barreau du Québec et l’Ordre des architectes du Québec.

Le règlement s’inscrit dans la raison d’être de l’Ordre : la protection du public. «L’Ordre doit s’assurer que ses membres ont les compétences requises pour exercer leur profession tout au long de leur carrière, indique la présidente, Maud Cohen, ing. Cette obligation justifie qu’on se dote de moyens pour soutenir les ingénieurs dans le maintien du développement de leurs compétences.»

En laissant les membres choisir eux-mêmes leurs formations et cibler les cours qui les serviront le mieux, le règlement cherche à faciliter le développement des compétences en lien avec la pratique professionnelle, ajoute Josiane Brouillard, CRHA et agente de formation à l’Ordre.

Atout de taille

Qu’elle soit obligatoire ne fait pas de la formation continue un mal nécessaire. «Davantage de formation est toujours bon pour la compétence des ingénieurs», affirme Tuan Nguyen Dang, directeur du Centre de formation continue de Polytechnique, qui offre une trentaine de formations par session sur des sujets comme la gestion de projets d’ingénierie ou encore les infrastructures urbaines durables.

Tenir ses connaissances à jour n’est rien de moins qu’essentiel à une bonne pratique. «On ne se ferait pas opérer par un médecin qui travaille avec des technologies des années 1960. C’est la même chose en ingénierie», estime Stéphane Godbout, ing., chercheur à l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement et président de l’Association des ingénieurs en agroalimentaire du Québec. «Connaître les tendances et les problèmes émergents permet de concevoir et de construire durablement, en respectant la société, les gens et l’environnement.»

Pour Geneviève Renaud, ingénieure junior chez Patenaude-Trempe, la formation continue est la meilleure façon de suivre l’évolution de la technologie, comme les logiciels de calculs. «C’est aussi une occasion de réseauter, ajoute-t-elle. Ça permet de rencontrer de futurs collègues et d’apprendre de leurs expériences, ce qui peut mener à des échanges de services, de références ou de conseils.»

C’est également un outil pour se démarquer et gravir les échelons. «La compétition est forte pour occuper les postes libérés par les départs à la retraite des baby-boomers, estime Yves Lavoie, ing. et président du Réseau des ingénieurs du Québec [RéseauIQ]. La formation devient un atout pour les nouveaux employés comme pour ceux déjà en poste.»

Choix multiples

Les cours admissibles (voir encadré) sont nombreux et diversifiés : propriété intellectuelle, inspection des structures, gestion du stress, etc. Leur durée varie généralement entre un et trois jours, et leur coût – souvent assumé par l’employeur – est de quelques centaines de dollars par jour.

Comment choisir une formation pertinente? Josiane Brouillard suggère d’abord d’identifier ses besoins. L’Ordre a d’ailleurs développé des outils pour aider ses membres dans cette démarche.

Certains fournisseurs offrent un service de soutien pour aiguiller les ingénieurs dans le choix d’une formation. C’est le cas du RéseauIQ, qui propose environ 200 formations par année. «Pour assurer la pertinence des cours, nous analysons chaque année les besoins de formation auprès de 200 des 500 plus importantes firmes d’ingénierie québécoises. Nous sondons aussi les besoins de nos membres», explique Yves Lavoie. La réflexion est amorcée pour étendre les services à l’extérieur de Montréal et de Québec.

Un service similaire devrait prochainement voir le jour au Centre de formation continue de Polytechnique, dont l’offre de cours à distance sera aussi accrue.

Entreprises à l’avant-garde

Bon nombre d’employeurs sont déjà montés dans le train de la formation continue. Chez Bombardier aéronautique, par exemple, elle est au programme depuis longtemps. «Dans une entreprise de classe mondiale comme la nôtre, qui développe des produits de pointe, la compétence et les connaissances des ingénieurs sont des éléments-clés pour se positionner par rapport à nos compétiteurs», explique Céline Sage, directrice des ressources humaines pour l’ingénierie.

Résultat : l’entreprise prend en charge l’apprentissage de ses troupes. «En 2010-2011 seulement, 927 employés ont été formés à l’interne pour l’utilisation d’outils informatiques, et 1 658 employés ont suivi d’autres formations, illustre Jean-Paul Lemarquis, ingénieur et doyen de l’Université Bombardier en génie, un service voué au développement des compétences des employés. La nouvelle obligation changera donc peu de chose pour nous.»

À la firme de génie-conseil BBA, la pratique est aussi ancrée dans la culture. L’entreprise investit 2 % de sa masse salariale en formation, deux fois plus que ce que le gouvernement du Québec n’exige en vertu de la Loi sur les compétences. «Chaque employé dispose d’une somme annuelle de 500 $ pour une formation à l’externe, indique Sylvie Beaulieu, ing., chef de service, Formation. Les employés sont ensuite invités à partager leurs nouveaux savoirs avec leurs collègues.»

L’élève qui devient professeur? Pourquoi pas!

Formations admissibles

Quelles activités comptent dans les 30 heures imposées par l’Ordre?

Pour être admissible, une formation doit être liée aux activités professionnelles de l’ingénieur. Gestion de projets, éthique et déontologie, communication en milieu de travail et sujets techniques peuvent notamment être abordés. Les cours suivis dans le cadre d’une maîtrise, d’un certificat ou d’un microprogramme sont aussi comptabilisés, pourvu qu’ils soient en lien avec les activités professionnelles.

Pour plus d’information, consultez le Guide d’application du règlement et la Foire aux questions, tous deux accessibles sur le site de l’Ordre, dans la section développement professionnel (www.oiq.qc.ca). (C. M.-M.)