Formation continue en TIC : mise à jour

techno

Versions 2.3, 4.5, 7.0… Pas facile de garder ses connaissances à jour alors que la technologie évolue à la vitesse de l’éclair. Quelques idées pour rester dans le coup.

Dans ses bureaux de Québec, l’équipe de Sarbakan attend impatiemment la 3DS, la prochaine console portative de Nintendo, dont la sortie doit s’effectuer d’ici mars 2011. Pour l’essayer, bien sûr. Mais surtout pour commencer à créer des jeux adaptés à cette machine.

Avant de se mettre à l’ouvrage, les employés de ce studio devront toutefois apprendre une nouvelle méthode de programmation.

«On est constamment à la remorque de la technologie», affirme Samuel-Alexandre Bourret, coordonnateur aux ressources humaines chez Sarbakan. Chaque fois qu’un logiciel d’animation ou une console arrive sur le marché – des événements assez fréquents –, l’entreprise doit former ses travailleurs.

En plus, les acquis ne sont pas utiles éternellement. «Une étude de Merrill Lynch a estimé que les connaissances en TIC ont un cycle de vie de trois ans. Après quoi, elles deviennent désuètes.

Dans les autres secteurs professionnels, la moyenne est plutôt de huit ans», raconte Rémi Villeneuve, conseiller à la formation chez TECHNOCompétences, le Comité sectoriel de main-d’œuvre en technologies de l’information et des communications. S’ils veulent éviter d’être dépassés, les travailleurs doivent suivre le rythme. «Dans le milieu de la musique, quand quelque chose est dépassé, les gens disent à la blague “c’est tellement 2009”. Dans le monde du jeu vidéo, on dit plutôt “c’est tellement juin”!» lance Samuel-Alexandre Bourret.

Professeur Web

«Dans les TIC, si tu crois que la formation continue est un mal nécessaire, tu ne seras pas très heureux», affirme Rémi Villeneuve. Heureusement, les outils d’apprentissage sont nombreux et variés : de tout, pour tous les goûts et à tous les prix.

Internet, avec sa mine d’information et de tutoriels gratuits, est un incontournable pour les autodidactes comme François Martel, technicien en intégration multimédia à la TÉLUQ. Plusieurs fois par jour, il jette un coup d’œil à une liste de fils RSS sur son téléphone intelligent pour connaître les innovations les plus récentes en multimédia. «Je surveille une trentaine de blogues et de sites spécialisés de cette manière, raconte-t-il. Lorsque je tombe sur quelque chose d’utile, comme une nouvelle manière d’employer un outil dans un logiciel, je le lis ou je le sauvegarde pour plus tard.»

En tout, François Martel estime consacrer six heures par semaine à l’acquisition de nouvelles connaissances. S’il fait régulièrement des lectures à la maison, le gros de sa formation a lieu au travail. «Quand mon patron me demande de réaliser quelque chose que je n’ai jamais fait, je trouve un tutoriel sur le Web et je prends une petite demi-heure pour l’étudier.»

Pousser plus loin

Pour aller en profondeur, il faut cependant sortir son portefeuille. Plusieurs sites de formation nécessitent un abonnement. Digital-Tutors, par exemple, offre différents forfaits (un abonnement annuel pour 399 $, un mois pour 45 $, etc.) qui donnent accès à plus de 11 000 tutoriels avancés sur l’utilisation d’une trentaine de logiciels de création multimédia comme Photoshop et After Effects.

Dans certaines régions, en partenariat avec des cégeps, Emploi-Québec offre des formations – programmation, animation 3D, utilisation de divers logiciels, etc. – à 1 ou 2 $ l’heure. «Au privé, une formation semblable de sept heures peut coûter 1 000 $», affirme Rémi Villeneuve.

Cela dit, avant de délier les cordons de sa bourse, une vérification s’impose. Plusieurs entreprises mettent des ressources à la disposition de leurs employés, telles que des étagères remplies de volumes techniques ou encore des abonnements à des bibliothèques en ligne.

Ceux qui préfèrent les cours donnés par une personne en chair et en os ont aussi intérêt à cogner à la porte du patron. «Si un employé veut suivre une formation à l’extérieur de l’entreprise, nous allons l’encourager en adaptant son horaire ou en payant une partie des coûts», explique Luc Loiselle, vice-président technologie, gestion du patrimoine et assurance de personnes au Mouvement Desjardins.

À long terme, le travailleur qui prend en main sa formation gagne plus que des connaissances. «En ce moment, nous effectuons un virage vers le développement en mode Agile, une méthode de gestion de projet en informatique que peu de gens maîtrisent, explique Luc Loiselle. Ceux qui vont chercher cette expertise au privé plutôt que d’attendre que Desjardins forme tous les employés auront une longueur d’avance. Ils travailleront sur les projets les plus intéressants.»

Retour en classe

D’autres optent pour des méthodes de formation plus inusitées. En 2006, après une demi-douzaine d’années à travailler dans le domaine de l’animation, Francis Gélinas a décidé de retourner à l’école. Mais pas question de s’asseoir à un pupitre.

Il a plutôt choisi d’être à l’avant de la classe. «Je sentais que j’avais besoin de me mettre à niveau en animation 3D. Pour enseigner, il faut absolument être à jour, ça m’a donc forcé à apprendre.» Après beaucoup de lectures, il a commencé à donner des cours au Collège de Maisonneuve en techniques d’intégration multimédia ainsi qu’à l’Institut national de l’image et du son pendant quelques années.

Aujourd’hui, Francis Gélinas se consacre à couleur.tv, une boîte de postproduction spécialisée en animation et effets spéciaux qu’il a fondée avec un ami. Afin de continuer son apprentissage, il a développé un truc pour se former tout en travaillant : intégrer dans chaque projet une nouvelle technique d’animation, qu’il assimile au moyen de lectures. «C’est très stimulant, car ça évite la répétition d’un contrat à l’autre.»

Se spécialiser pour souffler

Certains seront tentés de se spécialiser pour simplifier la formation. «En se concentrant sur une seule technologie, les mises à jour et les nouveautés sont moins fréquentes et on peut ralentir le rythme un peu», explique Gabriel Girard, directeur du Département d’informatique à l’Université de Sherbrooke.

Mais il y a un risque : que la spécialisation choisie devienne désuète. «Le langage de programmation Cobol a déjà été très populaire. Aujourd’hui, il n’est pratiquement plus utilisé. Les experts de ce code ont dû se recycler», illustre-t-il.

Avec ou sans spécialisation, suivre l’évolution technologique dans tous ses détails est impossible, croit Gabriel Girard, fort de ses 30 ans d’expérience. «Souvent, mes étudiants sont surpris d’apprendre que je n’ai pas entendu parler de tel ou tel gadget, raconte-t-il. Mais à un moment donné, il faut accepter qu’on ne peut pas tout connaître.» Sans cesser d’apprendre pour autant!

 

Certification recherchée
Obtenir une certification peut permettre d’améliorer ses conditions de travail. Pourvu qu’on choisisse la bonne.

Les certifications sont de plus en plus nombreuses dans le domaine des TIC. En règle générale, elles attestent qu’un travailleur possède un certain niveau de compétence dans un domaine précis. Par exemple, la «Microsoft Certified IT Professional : Administrateur de la messagerie en entreprise» montre qu’une personne a les connaissances requises pour déployer et gérer un système de messagerie en entreprise avec le logiciel Microsoft Exchange Server 2007.

Les critères d’obtention varient. Les certifications les moins coûteuses (une centaine de dollars) s’obtiennent à la réussite d’un examen. D’autres, dont les prix dépassent souvent un millier de dollars, demandent que l’on suive un cours. Parfois, il faut avoir cumulé un nombre déterminé d’heures d’expérience ou être titulaire de certains diplômes pour suivre le cours.

«Pour les compagnies, une certification est un gage de qualité. Plusieurs offrent une meilleure rémunération aux employés certifiés», explique Rémi Villeneuve, conseiller à la formation chez TECHNOCompétences, le Comité sectoriel de main-d’œuvre en technologies de l’information et des communications.

Mais avant de s’embarquer, mieux vaut s’assurer qu’une certification est recherchée, notamment en étudiant les connaissances demandées dans les offres d’emploi. «Un travailleur qui choisit bien peut améliorer considérablement son sort, soutient Rémi Villeneuve. En ce moment, par exemple, il y a une pénurie de personnes certifiées SAP [NDLR : un progiciel de gestion intégrée] ou encore en programmation SharePoint et les entreprises sont prêtes à payer pour attirer ces candidats.»

Le travail n’est pas fini une fois la certification acquise. Pour la conserver, il faut généralement passer un autre examen quelques années plus tard. À moins, bien sûr, que la technologie soit devenue désuète! (M.-A. S.)