Compétences clés :
avez-vous les bons atouts?

Il ne suffit plus de savoir causer golf avec le patron pour gravir les échelons de l’entreprise. Ni de présenter son diplôme ou ses 20 ans d’expérience pour se faire engager. Aujourd’hui, les employeurs scrutent les confins de votre personnalité…

Savez-vous échanger avec vos collègues?
Êtes-vous responsable?
Avez-vous confiance en vous?
Faites-vous preuve d’initiative?
Êtes-vous persévérant?

Qu’importe le métier que vous occupez, soudeur ou vice-président, vous devez posséder des «compétences clés». Le concept, apparu au milieu des années 90 en même temps que celui de la «nouvelle économie», fait tache d’huile chez les employeurs. Parce qu’il est beaucoup plus facile d’expliquer le fonctionnement d’un logiciel ou d’un livre comptable à un employé, que d’essayer de lui apprendre à s’exprimer ou à résoudre des conflits.

Les compétences clés sont ni plus ni moins qu’une nouvelle façon de concevoir les connaissances, les acquis et les habiletés des travailleurs. «C’est le savoir être plutôt que le savoir faire», lance Roger Hébert, conseiller principal chez Groupe-conseil AON et président du Comité ressources humaines de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM).

L’an dernier, ce comité a publié un guide sur les «nouvelles» compétences clés, doté d’un questionnaire d’évaluation que peuvent utiliser les employeurs dans leur processus de sélection de candidats. Plus des deux tiers des compétences ciblées par ce guide ne sont pas directement liées avec la nature de la tâche à accomplir par le travailleur! Elles font davantage appel à la personnalité du candidat qu’à sa formation et à ses connaissances techniques. Parmi ces compétences se trouvent, entre autres : la capacité de communiquer, d’apprendre et de penser; le fait de posséder une attitude positive, des valeurs morales, de la confiance en soi et le sens des responsabilités; la faculté de s’adapter à toute forme de changement et de faire des concessions dans la résolution de problèmes, etc. (voir les encadrés).

«Aujourd’hui, si un employeur a le choix entre engager le meilleur informaticien du monde ou engager un informaticien qui est capable de partager ses connaissances avec les autres employés, il ferait mieux de choisir la seconde option», confirme Doug Watt, chercheur senior au Conference Board du Canada, un regroupement privé spécialisé dans la recherche en économie, auteur lui aussi d’un guide sur les compétences clés, qui a d’ailleurs servi de modèle pour le document de la CCMM.

Des compétences… universelles

«Dans les entreprises, nous nous sommes aperçus que certains travailleurs ont plus de succès que d’autres, explique Roger Hébert. Nous avons donc cherché à cerner les compétences qui sont à l’origine de ce succès. C’est en faisant ce travail que nous sommes parvenus à distinguer le profil d’un travailleur polyvalent et performant.»

Posséder ces compétences ne relève toutefois pas d’un concours de force — ne l’emporte pas celui qui en cumule le plus grand nombre. «Les compétences clés que nous avons identifiées font partie d’un profil général d’employés à succès, soutient Roger Hébert. Tout dépend du type d’entreprise ou d’organisation auquel vous avez affaire. Par exemple, dans l’entreprise où je travaille, je vais surtout considérer les capacités de communication des candidats, puisque le travail d’équipe est très important ici. Dans d’autres entreprises, ce seront d’autres compétences qui prédomineront.»

«Aujourd’hui, si un employeur a le choix entre engager le meilleur informaticien du monde ou engager un informaticien qui est capable de partager ses connaissances avec les autres employés, il ferait mieux de choisir la seconde option.»
— Doug Watt, Conference Board du Canada

Chez ABB Canada, une entreprise de génie électromécanique qui emploie 1 000 personnes au Québec, le questionnaire de la CCMM est appliqué à chacun des candidats à l’embauche, lors de l’entrevue. On leur demande, par exemple : «Comment vous y prenez-vous pour faire connaître ce que vous appréciez chez un collègue de travail?», ou encore «Qui a le plus influencé votre façon personnelle d’apprendre? Parlez-moi de cette personne. Que vous a-t-elle appris?»

«Nous n’utilisons le questionnaire qu’à titre indicatif, explique Raymond Beaulieu, vice-président des ressources humaines chez ABB Canada. On ne s’attend pas à ce qu’un candidat possède toutes les compétences clés.» L’entreprise espère plutôt voir le candidat acquérir les aptitudes manquantes dans le cadre de son emploi. «Si, lors du test, un candidat démontre certaines faiblesses à l’égard du travail d’équipe, on le fera travailler sur des projets qui lui permettront de développer cette compétence. Nous travaillons avec des humains, et les humains sont imparfaits», ajoute-t-il.

Du côté d’Alcan, une entreprise qui a participé à l’élaboration du guide de Roger Hébert, on utilise depuis huit ans un test de sélection basé sur le concept des compétences clés. Du candidat au poste de comptable jusqu’à celui qui postule comme directeur d’usine, tous doivent posséder des compétences de base en plus de leurs connaissances techniques : compétences d’affaires, personnelles et interpersonnelles.

«Lorsque je rencontre un candidat, j’essaie surtout d’évaluer ses compétences personnelles et interpersonnelles, souligne André Goyette, directeur du service de dotation et du développement. Un individu peut par la suite développer d’autres habiletés par le biais de la formation en entreprise, mais des compétences humaines, comme le leadership, ça ne s’apprend pas en claquant des doigts!»

Les compétences en question

L’idée des nouvelles compétences clés est apparue au milieu des années 90, au moment où l’expression passe-partout «nouvelle économie» faisait rage dans les discours politico-économiques.

Normal, puisque les deux concepts sont intimement liés. «Avant, notre économie reposait principalement sur nos ressources, alors qu’aujourd’hui c’est le savoir qui est plus important, explique Doug Watt. Il y a 15 ans, un travailleur de l’industrie de l’automobile devait être capable de soulever des pièces de métal, de manipuler divers outils… Maintenant que tout est automatisé, on demande à ce même travailleur d’avoir d’autres compétences, notamment une aptitude à apprendre et de l’initiative.»

Les méthodes de travail des entreprises et des organisations ont passablement évolué au cours des dernières années. On fonctionne par projets, ce qui implique davantage de travail d’équipe. Le rythme de production accéléré exige de la part des employés une capacité à s’adapter rapidement au changement. «Dans le secteur des nouvelles technologies, le cycle de vie d’un produit est extrêmement court : de 6 à 12 mois maximum, poursuit Doug Watt. Les compagnies doivent donc être très créatives pour garder le rythme, pour innover. C’est dans un contexte comme celui-là que les compétences clés prennent toute leur importance.»

«Nous nous sommes aperçus que certains travailleurs ont plus de succès que d’autres. Nous avons donc cherché à cerner les compétences qui sont à l’origine de ce succès.»
— Roger Hébert, Comité ressources humaines de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain

Mais les employeurs ont beau ne jurer que par les compétences clés, encore faut-il que ces dernières soient bien définies. «Le problème, c’est que, lorsqu’on commence à analyser un emploi et à essayer d’identifier les compétences qui le caractérisent, ça peut nous donner une liste quasi illimitée», explique Dominique Bouteiller, professeur à l’École des Hautes Études Commerciales (HEC) et spécialiste en gestion des compétences.

Déterminer les compétences clés est donc un exercice périlleux. «Souvent, poursuit Dominique Bouteiller, les entreprises reprennent des modèles et des tableaux de compétences qu’elles ont vu ailleurs, et qui ne sont pas forcément adaptés à leur réalité… Ceci dit, lorsqu’il est réalisé de façon rigoureuse et en lien étroit avec les caractéristiques de l’emploi, l’exercice fait ressortir l’essentiel des compétences à maîtriser qui font la différence entre un employé moyennement efficace et un employé performant.»

Dans les grandes entreprises, ce sont justement des spécialistes des ressources humaines qui ont la tâche d’évaluer les candidats et les employés à l’aune des compétences clés. «Mon questionnaire est un outil : il n’est pas une panacée», prévient d’ailleurs Roger Hébert.

Bref, l’élaboration d’un système d’évaluation des compétences clés est un processus rigoureux qui doit être mené à bien par des gens… qui ont les compétences pour le faire.

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